jeudi, 01 mai 2014

beurreLe 1er mai marquera les 5 ans depuis la suppression des contingents laitiers (quotas) en Suisse. Où en sommes-nous aujourd'hui ? Dans le Schweizerbauer du 19.3.2014, la porte-parole d'Emmi présente la situation comme suit : « Le problème fondamental du marché laitier est l'imprévisibilité de la production laitière. »

 

Ce disant, elle admet qu’il ne faut PAS chercher le problème du marché laitier suisse du côté de la demande. Toutefois, on doit compléter l’affirmation d’Emmi en ce que la production laitière n’est aucunement imprévisible pour un paysan. En effet, le producteur peut facilement gérer la quantité produite : un meilleur affouragement (en termes d’apports nutritifs) résulte en une augmentation de la production, tandis que la réforme prématurée ou le tarissement anticipé d’une vache réduisent la production. Donc, si ces méthodes sont appliquées par 20 000 producteurs, il est possible de produire un volume total sur mesure. À l’époque des contingents, cela fonctionnait à merveille.

L’absence de contrats est à blâmer

La quantité livrée est seulement imprévisible en l’absence de contrats d’achat de lait. Et, en effet, il est navrant de constater que cette situation problématique persiste encore 5 ans après la fin des contingents, alors que la conclusion d’un contrat d’achat de lait comprenant les quantités et les prix pour la durée d’au moins une année est obligatoire. Il s’agit pour le moins d’une négligence extrême et délibérée qu’en 2014, plus de 90 % des paysans n’aient pas encore signé un tel contrat. Cette omission est commise, parce que les acteurs du commerce et de la transformation n’ont aucun intérêt à changer la pratique et parce que l’omission n’est pas sanctionnée. BIG-M est convaincue que l’absence de contrats à l’échelle des producteurs est à la base de l’opacité du marché laitier : tant qu’il y a des ententes contractuelles entre les (organisations) acheteurs et les transformateurs et une absence de contrats entre producteurs et acheteurs, il y a une trop grande marge de manoeuvre pour les magouilles. Un bon gérant peut facilement déclarer à la TSM les quantités achetées et revendues de façon à faire disparaître les différences dépassant 5 %. Ainsi, tout est en ordre pour l’OFAG, la TSM, l’IP Lait et surtout pour notre Conseil fédéral.

Quelles sont les conséquences directes de ces 5 ans de « marché laitier libre » ?

Dans ce pays, même les enfants savent que le prix du lait est loin de couvrir les coûts de production. Malheureusement, les surplus générés par l’absence d’une gestion des quantités livrent un argument clé aux décisions absurdes qui aboutissent à des interventions dans la production. La production devient de plus en plus chère, à mesure qu’on introduit sans cesse de nouvelles règlementations. La politique agraire avec sa tendance pour la « bureaucratie écologique » apporte son lot de complications aux fermes productrices.

À l’origine, la décision de supprimer les contingents laitiers au minimum 6 ans avant l’UE visait à nous donner une longueur avance par rapport à l’UE pour gagner en expérience avec le marché libre et procéder aux adaptations nécessaires. Donc, qu’avons-nous appris ? Nous continuons à investir des millions pour éliminer les surplus de beurre sur le marché mondial, puisque nous ne sommes pas capables d’adapter les quantités produites aux débouchés commerciaux. De plus, nous avons ruiné le meilleur débouché d’exportation pour le fromage, soit celui de l’Emmental. Des imitations bon marché (Swisstaler, Schweizer Grosslochkäse, Switzerland Swiss) ont provoqué un effondrement des prix. Ce n’est donc pas vraiment une « stratégie qualité » ! Nous devons constater que notre « longueur d’avance » de 6 ans a été perdue de façon irresponsable. De plus, si l’UE réussit, pour 2015,  à définir des règles qui empêcheront un effondrement du marché en raison d’une surproduction, la Suisse affichera déjà un retard. BIG-M commente : il n’y a pas un seul endroit sur terre où l’on bricole pendant 5 ans avec des solutions inadéquates pour résoudre un problème. Normalement, on remplace les responsables après un an de bricolage. Mais, à l’évidence, on ne respecte pas les règles économiques dans le secteur laitier.

BIG-M (traduction Uniterre)