jeudi, 12 novembre 2020
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Communiqué de presse de l'alliance suisse pour une agriculture sans génie génétique

Le Conseil fédéral souhaite prolonger de quatre ans le moratoire sur les cultures d’organismes génétiquement modifiés (OGM) à des fins agricoles. Le moratoire s'applique également aux produits issus de nouvelles techniques de génie génétique (NTGG). Cette décision est extrêmement bienvenue. Il permettra de sauvegarder et de renforcer la production suisse sans OGM. Cette prolongation permettra également de disposer de temps pour résoudre les questions non résolues relatives à la coexistence de différents types de culture et à la réglementation des NTGG.


L'agriculture suisse à petite échelle avec des petites parcelles intriquées les unes dans les autres implique que la coexistence de cultures sans OGM et de cultures GM est pratiquement impossible à mettre en oeuvre. La protection de l’agriculture sans OGM doit pourtant être garantie selon la Loi sur le génie génétique (LGG). Cela implique de pouvoir tracer les OGM et d’avoir des conditions cadres efficaces. Nous savons qu’elles seraient coûteuses à mettre en place et ne pourraient pas exclure le risque de contamination. Grâce au moratoire, la liberté de choix des consommateurs, qui est inscrite dans la loi, peut encore être garantie.


La liberté de choix n'est garantie que si les produits génétiquement modifiés sont étiquetés comme tels. La régulation selon la LGG impose aux développeurs de déclarer la technique utilisée et les séquences modifiées. Avec ces informations, il est possible de tracer ces nouveaux OGM comme le démontre une publication scientifique récente. Il est donc important de réguler ces NTGG selon la LGG.


Pour le Conseil fédéral (CF), le temps du moratoire doit être mis à profit pour répondre aux incertitudes liées aux NTGG, pour débattre de leur place dans une agriculture durable. En effet, ces techniques sont récentes et bien qu’elles permettent des modifications plus ciblées, un grand nombre de modifications non souhaitées surviennent dans les génomes. De plus ces techniques font toujours appel aux anciennes techniques de modification génétique très aléatoires pour faire entrer les composants dans les cellules. Enfin, la régénération des plantes transformées in vitro est aussi un processus mutagène. Les NTGG permettent d’effectuer un grand nombre de modifications génétiques en série (multiplexing) ce qui implique que la physiologie des organismes résultants peut être radicalement transformées. Il convient d’étudier les risques pour la santé et l’environnement liés à la dissémination de ces nouveaux organismes.


Les NTGG font l’objet d’une campagne de désinformation qui vise à faire croire que les changements effectués sont petits, précis et l’équivalent du naturel. Ceci pour échapper aux régulations en place sur le génie génétique. Il n’en n’est absolument rien, bien au contraire. Il relève d’un tour de force, d’un sophisme des experts en communication : se référer à la nature pour faire passer l’artificialisation du vivant. Certains prétendent qu’il serait possible de développer des plantes tolérantes à la sécheresse ou résistantes aux maladies sur le long terme ou encore des plantes ayant un rendement plus élevé. Après 40 ans de recherche et des milliards engloutis, tous ces projets ont échoué en raison de la complexité de la génétique qui détermine ces caractéristiques et de notre connaissance lacunaire du fonctionnement des génomes.


Nous sommes à l’aube d’une nouvelle ère où nous remplaçons le processus aveugle qui a façonné le matériel génétique sur notre planète pendant des milliards d’années par un processus de direction de l’évolution qui est conscient, intentionnel et surtout orienté vers des objectifs … de profits. En témoigne la course aux brevets dont ces NTGG font l’objet.


Ces techniques ne sont d’aucune utilité pour le développement d’une agriculture durable puisque les brevets ainsi que leurs produits appartiennent à une poignée de multinationale de l’agrochimie. Les OGM participent à la concentration du marché des semences et à une perte de l’autonomie des paysans ainsi qu’ à une industrialisation de l’agriculture dont il est impératif de se détourner rapidement.


En revanche, les approches interdisciplinaires telles que l'agroécologie représentent une alternative plus durable. Ces approches ont déjà fait leurs preuves et sont également recommandés par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) et l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Dans ces approches agroécologiques ce n’est pas la génétique qui est le facteur déterminant la production et les OGM ne sont d’aucune utilité.

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