Les opposants à la souveraineté alimentaire affirment que cette
initiative transformera les paysan.ne.s en fonctionnaires, que la
Confédération fixera des prix et qu'une économie étatique
planifiée devra être introduite. Ces affirmations ne correspondent
pas au texte de l'initiative et demandent une mise au
point.
Aujourd'hui, la destruction de l'agriculture paysanne
est orchestrée par l'État en tolérant les déséquilibres du
marché et le démantèlement de la protection douanière- elle sera
encore aggravée par les futurs accords de libre-échange. Au lieu de
pouvoir vivre de la production agricole, nous dépendons des
paiements directs, qui sont associés à de plus en plus de
contrôles. Avec la destruction quotidienne de trois fermes et de six
emplois, les familles paysannes suisses n’ont plus d’avenir et
sont contraintes à une production de niche. L'approvisionnement et
la souveraineté du pays est menacée.
Conformément à la loi
sur l'agriculture, le gouvernement fédéral doit déjà prévoir des
conditions-cadres permettant aux agriculteurs de dégager les revenus
les plus élevés possibles pour la production sur le marché
(article 7). Il appartient également au gouvernement fédéral de
veiller à ce que les agriculteurs puissent obtenir un revenu moyen
comparable (art. 5). En ce qui concerne l'entraide paysanne, la loi
stipule que les organisations paysannes représentatives peuvent
obtenir la force obligatoire accordée par l'Etat pour adapter de
l'offre à la demande. Les producteurs laitiers suisses ont un besoin
urgent d'une organisation dans laquelle chaque producteur a une voix
et dans laquelle aucun acheteur de lait ne peut représenter les
intérêts des producteurs de lait. En vertu de la loi, il des
contrats standards prévoyant des versements en quantité, qualité,
prix et avances pour un an (art. 37) doivent être conclus entre
producteurs et acheteurs.
Parce qu'aucun de ces articles n'est
mis en œuvre en Suisse les exploitations agricoles disparaissent.
C'est pourquoi ces textes doivent figurer maintenant dans la
constitution. Après, il sera trop tard pour pleurnicher !
Les
agriculteurs ont besoin de transparence de la part des acheteurs
ainsi que de contrats clairs pour obtenir un pouvoir de marché
équilibré, cesser d'être méprisés et obtenir plus de valeur pour
leur production. C'est une économie de marché qui n'a rien à voir
avec une économie planifiée par l'Etat. Ensuite, le nombre des
actifs dans l'agriculture augmentera automatiquement et la vie
paysanne renaîtra. Il y a suffisamment de travail et d'opportunités
entrepreneuriales pour la diversification des activités, surtout si
la population exigent davantage de durabilité des agriculteurs.
Cependant, il n'y aura pas d'amélioration du bilan écologique sans
de meilleurs prix.De cette manière, le problème de succession, de
reprise des fermes peut être résolu et les jeunes auront de
nouvelles perspectives d’avenir.
Il est également tout à
fait faux de dire que les prix à la consommation augmenteraient. Si
le prix du blé au niveau de la production était doublé, les
consommateurs suisses devraient payer 15 centimes de plus pour un
pain d'une livre. Comme avec le lait, le prix de production a été
réduit de près de moitié, tandis que le prix à la consommation se
situe toujours autour de 1,45 fr. La standardisation imposée par la
grande distribution est aujourd'hui à la charge des consommateurs.
La planification directe de la production entre producteurs et
acheteurs, en fonction de la demande, est plus économique et
efficace.
Le syndicat paysan Uniterre n'est ni de gauche ni de
droite, mais politiquement indépendant et se réjouit de tout
soutien et toutes les bonnes idées, qu'elles viennent de gauche ou
de droite. Pour ces raisons, il est incompréhensible que des
agriculteurs puissent être utilisés par EconomieSuisse et dire non
à un avenir pour l’agriculture paysanne. Le temps est venu pour la
souveraineté alimentaire. Oui à l'initiative!
Rudi Berli,
secrétaire syndical Uniterre et cultivateur de légumes à Genève
jeudi, 30 août 2018