vendredi, 26 mai 2017
vendredi, 13 octobre 2017
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Communiqué de presse de Prolait et Mooh



Prolait Fédération Laitière & mooh société coopérative

Yverdon/Zurich le 13 octobre 2017

Les producteurs de Prolait Fédération Laitière ont été et seront informés ces prochains jours lors de séances d’information sur les perspectives actuelles et sur de restructuration propo-sées par le Conseil d’administration. En plus de ladite restructuration, l’intégration de la com-mercialisation du lait industriel Prolait dans mooh société coopérative est proposée.

L’évolution actuelle du marché laitier suisse met tous les acteurs du marché face à de grands défis. Pour Prolait Fédération Laitière, une étroite collaboration avec l’organisation de commerce de lait mooh société coopérative est vue comme une opportunité pour ses producteurs et pour toute sa ré-gion.

L’intégration de la commercialisation du lait industriel de Prolait par mooh société coopérative est pré-vue le 1er janvier 2018. Les producteurs et les clients des deux organisations pourront profiter des sy-nergies engendrées par ce regroupement.

De son côté, Prolait Fédération Laitière continuera à développer et renforcer ses activités fédératives dans sa région. A partir du 1er janvier 2018, mooh société coopérative comptera une quantité annuelle de lait commercialisée d’env. 75 mio. de kg supplémentaires et env. 400 nouveaux membres.

vendredi, 13 octobre 2017

Le processus de ratification par l’ONU de la Déclaration sur les Droits des paysans et des personnes travaillant dans les zones rurales a franchi une étape décisive.

En effet, la résolution concernant cette déclaration a été acceptée à une écrasante majorité ce 29 septembre par le Conseil des Droits de l’Homme.

Par ce vote (34 voix pour, 2 contre et 11 abstentions), le Groupe de travail intergouvernemental à composition non limitée a reçu le mandat de négocier, finaliser et présenter le texte du projet de la Déclaration des Nations-Unies sur les Droits des paysan-nes et autres personnes travaillant dans les zones rurales jusqu’en juin 2018.


Un soutien croissant des pays membres

Il est extrêmement réjouissant de constater la croissance du nombre de voix favorables à ce projet. En 2012, on comptait 23 voix favorables, en 2014 : 29 et en 2017 : 34 ! (voir article Uniterre du 3 juillet 2014 sur le sujet) et nous devons saluer l’engagement du groupe de travail intergouvernemental (GT) présidé par la Bolivie et l’excellente collaboration avec la société civile.

Les prochaines étapes seront consacrées aux négociations sur les contenus de la déclaration et à des actions de lobby afin que le projet de texte soit accepté tout d’abord par les pays membres du Conseil des droits de l’homme à Genève et ensuite en Assemblée générale à New York.

Un important travail attend le GT, La Via Campesina et ses partenaires pour que l’année prochaine, après plus de 10 années de travail, la déclaration soit officiellement acceptée par les Nations-Unies.


La déclaration sur les droits des paysan-ne-s et autres personnes travaillant dans les zones rurales

La déclaration veut répondre à la situation spécifique des paysannes et paysans, travailleuses et travailleurs agricoles, sans-terre, pêcheuses et pêcheurs, bergères et bergers, nomades. Pour ce faire, elle s’appuie sur des droits préexistants (déclaration des droits de l’homme, de la femme et de la citoyenne, des peuples autochtones, etc.) en les adaptant à la situation des communautés rurales et propose aussi des droits qui répondent aux menaces nouvelles dont ces communautés sont les victimes, comme entre autres, l’accaparement des terres, la déforestation industrielle et la dégradation des sols par l’érosion et l’utilisation massive d’intrants.
Concrètement, les réponses à ces menaces sont le droit à la terre, aux semences, aux moyens de production, à la souveraineté alimentaire, à la biodiversité, à un revenu et niveau de vie décent.


Une déclaration bénéfique pour toutes et tous

Cette déclaration est bénéfique pour le monde, comme le dit Olivier de Schutter que nous résumons ci-après.
« Une agriculture à petite échelle rend de nombreux services à la société, elle contribue au maintien de la biodiversité et d’un sol sain. Elle a un rôle économique et vital, non seulement parce qu’elle nous nourrit, mais aussi parce qu’elle est à la base de toute une série de métiers, commerces, unités de transformation, restaurants qui font vivre une région. Intégrée dans une économie locale, l’agriculture à petite échelle met à disposition de la population des produits frais et sains, sans transport sur de longues distances. »

De plus, la déclaration répond aux objectifs du Millénaire pour le développement et elle est une voie concrète pour le développement d’un système alimentaire plus résilient.

La Déclaration ouvre des portes, donne des outils, permet de développer des solutions pour une paysannerie et des communautés locales vivantes, autonomes et novatrices.

Michelle Zufferey


Pour en savoir plus sur les contenus de la Déclaration :


vendredi, 13 octobre 2017
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Communiqué de presse d'Uniterre


A la fin du mois de juin 2017, devant la pression des organisations paysannes et au vu des marchés internationaux favorables, certains membres de l’Interprofession du lait ont accepté de concéder quelques centimes supplémentaires aux producteurs. Ce fut le cas notamment de Coop, qui par l’intermédiaire de son fournisseur Emmi, s’est engagé à verser 3 centimes supplémentaires par kilo de lait produit dans le segment A, et ceci dès le 1er juillet 2017.

Mardi 10 octobre, la Coop annonce qu’elle répercutera dorénavant cette hausse au niveau du prix à la consommation. Le litre de lait UHT augmente ainsi de 5 centimes, de même que le demi-litre ! Divers autres produits laitiers subissent eux aussi une augmentation, dont le beurre en particulier, les 250 gr passant de 2.85 frs à 2.95 frs. Comme toujours en pareilles circonstances, la hausse est plus forte au niveau du consommateur qu’elle ne l’est au niveau du producteur. La marge du distributeur est ainsi augmentée de façon à peine perceptible, mais l’on imagine aisément ce que cela peut représenter sur le volume total commercialisé par Coop.

Plus choquants surtout sont les propos mensongers du géant orange qui prétend ainsi offrir un prix équitable aux paysannes et paysans. Avec 3 centimes supplémentaires, la situation des producteurs n’évolue guère. Si toute augmentation a forcément quelque chose de positif, le prix proposé par Coop depuis juillet (et par quelques autres transformateurs depuis le 1er octobre, le prix indicatif de l’IP lait ayant également été relevé de 3 centimes entre temps) est de toute façon très largement insuffisant pour permettre de parler d’équité. Avec un revenu horaire le plus souvent inférieur à 10.-, les producteurs ne disposent actuellement pas d’un prix équitable pour leur production.

S’il est vrai que le marché laitier indigène est dépendant des marchés européens et internationaux, exposant les paysannes et paysans suisses aux affres de la concurrence étrangère, la marge des transformateurs et distributeurs reste, elle, typiquement helvétique.


vendredi, 29 septembre 2017
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Dans les rayons des supermarchés suisses, 1 produit sur 6 contient de l’huile de palme. Pour produire cette huile de palme, des populations sont déplacées, leurs terres volées et la forêt équatoriale détruite.

L’huile de palme viole les droits humains et détruit l’environnement !

Tu peux agir contre cela : demande aux grands distributeurs suisses qu’ils réduisent le nombre de produit contenant de l’huile de palme de leur assortiment. Signe notre pétition dès à présent !

https://voir-et-agir.ch/stop-accaparement/

Pour plus d'informations:

https://www.facebook.com/voiretagir/

https://voir-et-agir.ch/medias/

Communiqué de presse :https://sehen-und-handeln.ch/content/uploads/2017/...

Campagne lancée par Pain pour le Prochain et Action de Carême


vendredi, 29 septembre 2017

Article écrit par Jérôme Léchot suite à la campagne Denner "Fair zu den Bauern"


Dans une campagne publicitaire, Denner promet des produits bon marché – et des prix équitables aux paysans. Une contradiction ? Nous avons discuté avec Denner et appris une chose : cette pub est emblématiques des abîmes du commerce de détail.

« Trop cher ? Nous vous aidons » promettait Denner en mars. Avec un peu de chance, ceux et celles qui partageaient une photo avec #tropcher sur Facebook, Instagram ou Twitter obtenait l’article en question à un meilleur prix, voire gratuitement. Martina K. de Balsthal a posté sur zuteuer.ch une photo de ses achats avec le titre « famille de 5 personnes, nourriture trop chère ». Elle a reçu 177 « j’aime » de personnes qui sont d’accord avec elle ; seulement 3 personnes ne trouvent pas la/cette nourriture trop chère. Une action réussie pour Denner, qui se l’est offerte pour son 50e anniversaire, afin de redonner un nouvel élan à la mentalité « radin, c’est malin ».

En mai, Denner lançait sa prochaine campagne. Cette fois-ci, les affiches SGA arboraient le slogan « équité pour les paysans » avec, à l’arrière-plan, un tracteur archaïque qui roule vers un coucher du soleil. Avec cette campagne, Denner promet des prix équitables aux paysans. Et aux consommatrices, qu’elles peuvent acheter des produits bon marché sans mauvaise conscience. N’est-ce pas contradictoire ? Denner peut-il effectivement offrir des produits alimentaires bon marché à ses clients tout en rémunérant équitablement les paysannes et les paysans ?


Légende: Équité pour les paysans ?„Un écran de fumée pour les consommateurs qui permet aux distributeurs d’engendrer des profits sans retenue , écrit ainsi le syndicat paysan Uniterre dans une lettre à Denner et IP-SUISSE.


À notre question, Denner répond par la positive: « Grâce à la collaboration stratégique et durable avec IP-Suisse, les existences dans l’agriculture sont garanties pour aujourd’hui et pour les futures générations ». Denner serait en mesure d’offrir des prix bas « grâce à des structures légères et une logistique optimisée ».

Toutefois, « pour des raisons de concurrence », Denner ne veut pas indiquer concrètement, à l’exemple du prix du lait au producteur, ce qu’il faut comprendre par « équitable ». Seul chiffre divulgué par Denner : pour le Lait des prés d’IP-Suisse, les paysannes et les paysans reçoivent un supplément de quatre centimes par kilo de lait. Ces 4 centimes suffisent-ils pour garantir les « existences dans l’agriculture » ?


Tout le monde veut être équitable. Personne ne l’est.

Nous avons refait le calcul. Résultat : quatre centimes, ce n’est pas assez, et de loin pas. Tout simplement, parce que le prix de base est beaucoup trop bas avec 60 centimes par kilo de lait (moyenne 2015, Statistique laitière de la suisse 2015). Tellement bas qu’il ne couvre nullement les coûts de production. Selon le syndicat Uniterre, les coûts de production se montent à 98 centimes en zone de plaine. En zone de montagne, ils peuvent grimper jusqu’à 164 centimes par kilo. Donc, les 4 centimes supplémentaires par kilo ne suffisent même pas si l’on rajoute les 20 centimes de payement directs que les paysans laitiers reçoivent de la Confédération. Voici pourquoi plus de la moitié des 50 000 exploitations laitières de 1990 ont disparu.

Les survivants survivent grâce à deux stratégies. La première consiste à louer les terres de ceux et celles qui ont abandonnés et à miser sur des vaches à haute productivité en important des aliments concentrés. Ainsi, avec 3,5 millions de tonnes de lait par année, les 21 000 exploitations laitières produisent 0,5 millions de tonnes de plus que les 50 000 exploitations en 1990. Simplement, industriellement.

La deuxième stratégie, beaucoup plus importante, s’appelle auto-privation. Avec une charge de travail similaire à celle d’un médecin en chef, le quart inférieur des paysans en zone de pleine (production de lait, de viande et de cultures confondus) atteint un salaire horaire de 6.30 francs (Rapport agricole 2016), en zone de montagne, le salaire horaire est de 4.60 francs et en zone de colline 4.30 francs. Un quart des paysans indique ne jamais prendre de vacances. Soit, parce qu’ils ne peuvent pas partir à cause du travail, soit, parce qu’ils n’ont pas assez d’argent.

Donc, parler de prix « équitables » pour les paysans, c’est dérisoire. Et à la dérision s’ajoute l’hypocrisie : les prix dumping n’arrivent pas à assurer ces « existences » de romance fermière, dont parlent les affiches de Denner. Ceux qui survivent avec des prix pareils sont les exploitations industrielles avec des robots de traite et des vaches à haute productivité. Les petites fermes, celles qui pourraient garantir un approvisionnement écologique de proximité avec des aliments de qualité, ne servent plus qu’à fournir des modèles esthétiques à des emballages et des spot publicitaires.

Toutefois, Denner n’est pas la seule entreprise à se lancer dans le pseudo-équitable. Aldi vient de lancer « Fair Milk » qui promet aux paysans 70 centimes par kilo de lait. Ce faisant, le magasin discount allemand dépasse Denner avec ses 4 centimes IP-Suisse supplémentaires au prix de 60 centimes de la Migros. Bien que tout le monde, y compris la Coop, nous assure de payer un « prix équitable » – nous devons parler d’un prix de consolation. Aussi honnêtes qu’aient été les intentions derrière ces augmentations de prix, même les 70 centimes ne résultent que dans un salaire horaire de 5 francs, comme nous le démontrent les calculs du syndicat Uniterre. Et à cette dernière de constater : « C’est de la publicité mensongère ! » Il est donc hors de question de parler d’équité, même pour le plus offrant Aldi (!), sans parler de Migros et Coop, qui se placent derrière Denner.


Paysans épuisés et caisses pleines dans les magasins font partie du système

L’hypocrisie et la dérision des campagnes publicitaires sont des symptômes d’un problème plus profond. Pour le comprendre, nous devons jeter un coup d’œil sur l’ensemble du système, soit l’industrie alimentaire, respectivement le commerce de détail. Il apparaît que Denner vient juste de mettre les pieds dans le plat. Au cours des 27 dernières années, ce sont surtout les grands acteurs du marché comme Emmi, Coop et Migros, société mère de Denner, qui ont fait pression sur les prix.

Contrairement aux paysans, les transformateurs et les détaillants sont bien organisés. Parallèlement à la dérégulation du marché alimentaire qu’ils ont soutenu (la libéralisation du marché du fromage avec l’UE en 2007 et la suppression des quotas laitiers en 2009 entre autres), ils ont réussi à faire baisser les prix à la production agricole en Suisse de 30 % depuis 1990. En soit, une bonne nouvelle pour les chasseurs de bonnes affaires. Malheureusement, dans le même laps de temps, les prix à la consommation en Suisse ont augmenté de 12 %!

Légende: Depuis 1990, les prix à la consommation ont augmenté de 12 %, tandis que les prix à la production ont chuté de 30 %. Les barres grises indiquent les marges supplémentaires engrangées par les transformateurs et les détaillants depuis 1990. Graphique : das Lamm. Données : prix à la consommation : OFS 2016, prix à la production : Agristat 2016. Idée pour le graphique : Uniterre.


Comment les détaillants ont-ils réussi à écumer 12 % de plus auprès des consommateurs, malgré leurs prix à l’achat nettement inférieurs ? La formule magique s’appelle « différenciation de prix » (aussi appelée « discrimination par les prix »). Les détaillants continuent à offrir des prix bon marché pour les aliments de base comme la farine, le sucre et le lait des lignes standard. Car, le kilo de farine, le litre de lait, les 100 g de gruyère, ce sont des produits de référence et la clientèle s’en souvient. Pour ces produits-là, la marge de Migros & Co. n’a pas changé, les baisses de prix ont été transmises à la clientèle. La raison pour laquelle les achats d’aliments sont tout de même plus chers, ce sont les « produits spéciaux » qui promettent une certaine plus-value. La société mère de Denner est championne dans la différenciation de prix :

Son lait Heidi, elle le promeut avec des images d’agriculture de montagne, un alpage, où les boilles de lait sont encore roulées en bas de la montagne. Pour la plus-value, c’est-à-dire pour la « collecte » de lait coûteuse et le marketing encore plus coûteux, la Migros se dédommage généreusement : avec 1.70 franc par litre, le lait entier Heidi coûte bel et bien 60 centimes plus cher que sa sœur Valflora (1.10 franc par litre de lait entier). La perfidie du système, c’est que pour l’image de Heidi sur l’emballage, le paysan des montagnes ne reçoit pas un seul centime de plus pour son lait. Au contraire, grâce au marché, ses prix sont durablement à la baisse : de 1.35 franc par kilo en 1990 en passant par 77 centimes en 2004 (introduction de la marque Heidi) à 62 centimes en 2015 (prix moyens,Statistiques laitières de la Suisse 1990, 2004 et 2015, niveau 2015).

Légende : Pour quel lait le paysan reçoit-il un meilleur prix ? La réponse qui semble évidente n’est pas la bonne. Il reçoit la même chose pour les deux.


Pour le nouveau Lait des prés IP-Suisse de Denner, qui ne coûte que 1.30 franc par litre de lait entier, le paysan reçoit un supplément de 4 centimes. Et la nature un supplément écologique. Toutefois, Denner ne nie pas avoir recours à une différenciation de prix miniature et écrit : « Pour des raisons de concurrence, Denner ne fait aucune indication quant à ses marges ».

Un autre exemple peut être illustré avec les spécialités de pain : d’un pain bis qui coûte 2.20 francs le kilo à la Migros, 50 centimes vont à la paysanne qui fait pousser le blé. Les mêmes 50 centimes vont à la paysanne pour un pain gourmet qui coûte 8.75 francs le kilo. Migros cache habilement cette différence de prix en vendant le pain gourmet à 400 g et non pas 500 g. Qui est-ce qui sait faire ce calcul de 400 g à 1000 g en un clin d’oeil? Les quelques graines ne peuvent pas justifier la différence de prix énorme entre le pain gourmet et le pain bis.

Donc, nous payons « plus », parce que les professionnels du développement de produit et de la publicité nous font croire à des produits « meilleurs ». En général, la plus-value n’arrive pas jusqu’à la paysanne qui fait un travail de forçat pour un salaire misérable. En réalité, il ne nous coûterait pas plus cher de payer des prix équitables. Il suffirait de rendre aux paysannes une partie de la plus-value empochée par les détaillants. Ou de payer un tout petit peu plus cher, afin que les paysannes reçoivent aussi quelque chose pour leur lait – pas seulement le service marketing de Migros, Denner & Co. qui se battent pour la clientèle avec des campagnes comme #tropcher.


Nos aliments sont-ils vraiment #tropcher ?

Le problème avec le faux-pas publicitaire de Denner n’est pas la contradiction flagrante entre prix équitables aux paysans et promesse de prix planchers aux consommateurs, le vrai problème, c’est l’impression laissée par cette campagne : nos aliments seraient trop chers.

Malgré l’augmentation de 12 % des prix à la consommation depuis 1990, nous ne payons pas cher pour notre nourriture. Avec en moyenne 7 % de notre revenu attribué à la nourriture, la Suisse occupe l’avant-dernière place dans l’Europe, avant la Norvège. À Genève, il faut travailler en moyenne 7 minutes pour pouvoir s’acheter un pain. À Paris, il faut travailler 15 minutes, à Rome 17 minutes. Et avec une même quantité de travail, on peut acheter deux fois plus de lait à Zurich qu’à Paris.

Si les paysannes recevaient 1 franc par litre de lait, au lieu de 60 centimes, comme le syndicat Uniterre le demande depuis des années, nous pourrions toujours acheter plus de lait que les Parisiens et les Parisiennes. Même si les détaillants gardaient leurs marges généreuses et les magasins discount leurs marges modestes. À la différence près que les paysannes pourront à nouveau se permettre d’acheter leur propre lait, même en le retrouvant dans un emballage Heidi dans une étagère de la Migros. Par exemple durant des vacances au Valais – vacances, qu’elles pourraient enfin se permettre pour se reposer d’une semaine normale de 55 heures.


La réponse de Denner

Denner réfute le reproche de faire pression sur les prix avec sa campagne #tropcher : dans le cadre de la campagne pour leur jubilé, Denner avait laissé la clientèle décider de ce qui était « trop cher ». Ou pas. Denner regrette : « S’il s’avère qu’il y a des consommateurs qui estiment que les aliments (suisse) sont trop chers, cela ne fait que confirmer un fait que vous avez mentionné vous-même : la valeur attribuée aux aliments par notre société est à la baisse. Toutefois, il ne s’agit sûrement pas d’une réaction intentionnée par la campagne que Denner a lancée pour son jubilé. » C’est une bien maigre consolation pour les paysannes et les paysans.

Bien évidemment, la campagne de Denner n’est pas à elle seule responsable du désastre laitier. L’entrée sur le marché suisse de magasins discount comme Aldi et Lidl, le tourisme alimentaire dans nos pays voisins et les dérégulations mentionnées contribuent également à la dépréciation des aliments. Mais, avec une campagne du genre « radin, c’est malin », Denner cultive une mentalité qui juge que la nourriture est « trop chère », même si la comparaison avec d’autres pays prouve que notre nourriture est « bon marché ». Trop bon marché. Puisque les paysannes et les paysans, qui travaillent d’arrache-pied, ne reçoivent presque rien.

Denner souligne aussi que sa campagne #tropcher ne porte aucun préjudice au monde paysan, au contraire. Et voici comment cela fonctionne : grâce à leur structure entrepreneuriale très légère et ses petites marges, Denner réussit à empêcher en partie le tourisme alimentaire et cet argent reste en Suisse. « C’est de l’argent qui échappe autant aux producteurs qu’au commerce de détail, nous sommes tous dans le même bateau. »

Il est possible que Denner réussisse à donner l’envie aux Suissesses et aux Suisses, qui font leurs achats de l’autre côté des frontières, pour qu’ils reviennent dans les magasins suisses et achètent des yoghourts suisses, peut-être même avec du Lait des prés IP-Suisse plus écologique. Denner arrive peut-être même à attirer la clientèle qui ne cherche pas à faire des affaires par avarice, mais par nécessité. Un but honorable, en soi. Mais est-ce qu’il arrive à convaincre la paysanne, le paysan, qu’ils sont assis dans le même bateau que les autres, grâce à ces 4 centimes supplémentaires, si leur salaire ne dépasse même pas la marque des 5 francs par heure ? Il me semble qu’il faudra une preuve bien plus payante pour y arriver. Et non seulement de la part de Denner, mais de tous les détaillants et tous les magasins discount.

Traduit de l'allemand - source originale

mardi, 26 septembre 2017
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Les scandales alimentaires ont secoué l’été, avec une porcherie vaudoise dans le viseur. En France, de la viande de cheval vendue pour du bœuf, et d’insoutenables images d'abattoirs et d’animaux maltraités, ont suscité une onde de choc. La viande a mal à son image. Mais comment fonctionne en Suisse la filière de la viande? De l’étable à l’assiette, voyage dans un univers sous haute tension....(...)

https://pages.rts.ch/emissions/temps-present/88439...

mardi, 26 septembre 2017

Uniterre souhaite formuler un grand remerciement à la population suisse pour avoir plébiscité avec une écrasante majorité la sécurité alimentaire et pour avoir affirmé ainsi son attachement à l'agriculture paysanne suisse.

Maintenant, c'est à la population Suisse de confirmer cette volonté par une acceptation de l'initiative pour la souveraineté alimentaire qui sera probablement en votation fin 2018. Mais aussi au Conseil fédéral de mettre en œuvre une politique alimentaire d'avenir voulue par le peuple.

Communiqué de presse co-signé par l'Alliance pour la souveraineté alimentaire et Uniterre



samedi, 23 septembre 2017
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Les bactéries qui développent la capacité de survivre à un traitement aux antibiotiques ont l’avantage, elles se multiplient, tandis que les autres meurent. Cette sélection produit un nombre croissant de bactéries résistantes. Pour leur part, les antibiotiques sont répartis en différentes classes en fonction de leur façon d’agir. Ainsi, lorsqu’un antibiotique n’est plus efficace, il est possible d’utiliser un médicament d’une autre classe. Cependant, aucune nouvelle classe d’antibiotiques n’a été découverte depuis 30 ans. Il est d’autant plus important de sauvegarder l’efficacité des médicaments existants. Les antibiotiques les plus récents doivent être utilisés de façon particulièrement restrictive, afin de ne pas perdre de leur efficacité (les antibiotiques dits de réserve). L’utilisation excessive et parfois inappropriée d’antibiotique au cours des dernières années et décennies a conduit au développement de souches bactériennes résistantes contre tous ou quasiment tous les antibiotiques.

En Europe, le nombre de décès lié à une infection de bactéries résistantes est estimé à 25 000. Dans ce contexte, le Conseil fédéral et tous les Offices fédéraux compétents ont été impliqués dans l’élaboration et la mise en œuvre de la Stratégie Antibiorésistance Suisse (StAR), avec l’objectif de maintenir l’efficacité des antibiotiques dans la médecine humaine et vétérinaire. La santé humaine, la santé animale et la santé environnementale sont trois éléments étroitement liés qui s’influencent mutuellement. L’approche One Health favorise la coopération de ces différents domaines afin de préserver la santé de tous.

Les mesures de la stratégie sont réparties en huit domaines d’action

  • Surveillance : La distribution et l’utilisation d’antibiotiques, ainsi que les occurrences de résistances doivent faire l’objet d’une surveillance systématique. Cette démarche permet aussi d’évaluer le succès des mesures mises en œuvre.
  • Prévention : Lorsque l’on n’utilise pas d’antibiotiques, il ne peut y avoir des résistances. Ce domaine d’action vise à réduire les infections en améliorant l’hygiène et la gestion dans la médecine humaine ; dans l’élevage, des mesures comme l’amélioration de l’hygiène, l’optimisation des conditions de détention et la mise au point de traitements alternatifs comme les vaccinations permettent également de limiter l’emploi d’antibiotiques.
  • Utilisation rationnelle des antibiotiques : L’utilisation d’antibiotiques ne peut être évitée complètement. Cependant, lorsqu’elle devient nécessaire, il faut utiliser le médicament le plus efficace selon l’état des connaissances actuelles. Des directives précises et strictes concernant la remise et l’administration des antibiotiques critiques seront introduites, afin de préserver leur efficacité.
  • Lutte contre la résistance : Les résistances doivent être identifiées rapidement pour empêcher leur propagation.
  • Recherche et développement : Il existe des lacunes en matière de connaissances concernant l’apparition et la propagation des résistances. La recherche et le développement dans ce domaine, ainsi que les nouvelles découvertes en matière de diagnostic ou de substances antimicrobiennes sont soutenus.
  • Coopération : La coopération à l’échelle politique, scientifique et économique, ainsi qu’entre les domaines de la médecine humaine et vétérinaire, l’agriculture et l’environnement sera encouragée selon l’approche One Health.
  • Information et formation : La connaissance sur les antibiorésistances et leur prévention au sein de la population et des professionnels seront améliorées.
  • Conditions générales : Il s’agit d’éviter la création de mécanismes du marché ou d’incitatifs économiques qui vont à l’encontre de cette stratégie.1

En œuvre depuis 2016

La StAR a été approuvée par le Conseil fédéral en 2015, elle est mise en œuvre depuis 2016. Les productrices et producteurs ont pu constater quelques conséquences de cette mise en œuvre, en particulier l’interdiction de la remise d’antibiotiques de prophylaxie (protection de la mamelle) ou à titre de stocks. Bien que ces mesures ne soient pas toujours faciles à mettre en œuvre, elles sont importantes à long terme. Parallèlement, des projets de recherche en cours vont démontrer qu’une amélioration des conditions de détention et des mesures de prophylaxie peuvent contribuer à une réduction de l’utilisation d’antibiotiques. L’utilité de ces mesures peut sembler évidente à certains, mais ces travaux de recherche sont tout de même importants, puisqu’ils serviront de base d’argumentation pour une amélioration des conditions de détention.

Vigilance de mise

Dans la théorie, le programme de la StAR est excellent, mais il faut rester vigilant. En particulier dans le domaine des incitatifs économiques, le potentiel d’amélioration reste important. Au cours des dernières années, certains antibiotiques ont disparu du marché ; leur homologation étant échue, les entreprises pharmaceutiques ne voulaient pas supporter les frais importants d’un renouvellement de l’homologation. En revanche, certains nouveaux médicaments apparaissent sur le marché. Ils contiennent des antibiotiques de réserve et sont vendus à prix attrayant. Ce développement contribue uniquement à l’augmentation des bénéfices des entreprises, il est en contradiction frappante avec le concept d’une utilisation prudente. S’il est plus facile d’utiliser des antibiotiques de réserve, le risque est grand que leur utilisation devienne courante.

La prophylaxie connaît également différentes approches. Réduire l’utilisation d’antibiotiques pour améliorer la santé des animaux est une bonne alternative. Toutefois, de certains pays nordiques nous arrivent aussi des exemples moins bons : en réduisant l’introduction de germes par une plus grande industrialisation de l’élevage et une isolation des troupeaux de l’environnement, comme nous le connaissons déjà partiellement pour l’élevage de porc en Suisse. Un développement dans cette direction peut être judicieux dans le cadre de la problématique des antibiorésistances, mais il n’apportera certainement aucune amélioration pour le bien-être des animaux.

L’approche globale de la StAR est essentielle et reflète le constat que cette problématique n’est pas uniquement la faute des producteurs et des vétérinaires. La production animale tellement intensive qu’elle ne peut se passer d’antibiotiques n’est pas la seule responsable ; les phénomènes d’antibiorésistance résultent également de l’utilisation inconsidérée dans la médecine humaine. Ces problèmes sont causés par toute la population et doivent être traités dans ce sens. Dans la mise en œuvre, il faut aller plus loin que gronder ceux qui utilisent des antibiotiques. Les entreprises pharmaceutiques et les distributeurs doivent également rendre des comptes. Lorsqu’il s’agira de rédiger les directives sur l’utilisation d’antibiotiques importants, il faudra également établir des règles sur la production et la commercialisation de ces médicaments.

Lara Moser est membre d’Uniterre, elle travaille en tant qu’assistante clinique au Département pour la médecine vétérinaire clinique à la Clinique des ruminants de l’Université de Berne.



1: https://www.bag.admin.ch/dam/bag/de/dokumente/mt/star/strategie-star.pdf.download.pdf/strategie-antibiotikaresistenzen-ch.pdf


lundi, 18 septembre 2017
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« Nous nourrissons nos peuples et construisons le mouvement pour changer le monde » : une expérience inoubliable… Récits de Berthe et Joël, délégués d’Uniterre.


Le samedi 15 juillet, me voilà partie avec mon gros sac à dos à Derio, à coté de Bilbao, au Pays Basque ou « Euskal Herria » - en Basque justement ! – pour ma 1ère conférence internationale de la Via Campesina. Etant « jeune » et « femme », j’ai tout d’abord participé à l’assemblée des jeunes qui a eu lieu les 16 et 17 juillet et à l’assemblée des femmes qui s’est enchaînée : 17 et 18 juillet pour donner suite à 5 jours de conférence !

Bref, au total, 9 jours de conférence, autant vous dire que j’ai fini sur les rotules ☺ ! Mais ça en valait la peine… J’ai décidé de surtout vous faire partager mon ressenti, ce que mes tripes, mon cœur ont exprimé pendant cette semaine… Les déclarations, le contenu qui en est ressorti – j’y reviendrai un peu après ainsi que mon collègue Joël qui était là aussi – et vous pouvez le trouver sur le site de la Via Campesina.

Les émotions étaient au plus haut pendant toute cette semaine : je passais des larmes de joie provoquées par les sensations de lutte commune, d’inconscient collectif, où on se rend compte que partout sur cette planète, on rencontre les mêmes problèmes pour lesquels on se bat, ces moments où nous chantions tous ensemble un « Aleerta »… aux larmes de tristesse quand des collègues d’Amérique Latine nous racontaient la répression sanglante qu’ils vivent là-bas : les assassinats de paysans militants sont courants…les emprisonnements, les menaces… Ou encore cette jeune femme sud-coréenne qui a témoigné en plénière de l’assassinat de son père par un policier alors qu’il était JUSTE entrain de manifester pour ses droits dans la rue… Même certains interprètes ont eu du mal à continuer la traduction tellement l’émotion était forte…

En comptant les bénévoles, nous étions bien 600 personnes, de plus de 70 pays, lors des 5 jours de conférence. Essayez d’imaginer ! J’en ai le tournis rien qu’en y repensant. La conférence a fini en beauté avec une marche dans Bilbao le dimanche. Puis le lundi, des visites de fermes étaient organisées. C’était le moment de se dire au revoir… Mamma mia, autant vous dire qu’après cette semaine de très belles rencontres des 4 coins du monde, d’euphorie collective, les « au revoir » n’ont pas été faciles pour beaucoup…moi la première. Beaucoup m’ont dit en rentrant « ces rencontres remotivent beaucoup pour continuer la lutte », ce à quoi j’ai répondu que je n’avais pas encore eu le temps de me démotiver depuis ma prise de poste à Uniterre il y a 6 mois, mais que là, cela m’avait donné encore plus d’énergie pour avancer ! Ce que j’ai retenu de cette rencontre, c’est la belle énergie, la solidarité, l’ouverture et le respect entre tous, que l’on soit de cultures différentes, hommes, femmes, jeunes, etc : le beau côté de l’être humain…

Quelques extraits de la déclaration finale de la conférence qui m’ont particulièrement touchée : « L’agroécologie paysanne est le fondement de notre proposition et de notre vision de la souveraineté alimentaire des peuples du monde. Pour cela, nous devons nous battre pour une réforme agraire intégrale et populaire, pour la défense des territoires autochtones et paysans et pour la restauration de systèmes alimentaires locaux.

En plus de renforcer et de développer nos marché paysans locaux, nous devons construire de nouvelles relations entre les travailleur-se-s des campagnes et des villes, de nouveaux canaux de distribution et de vente ainsi qu’un nouveau modèle de relations humaines, économiques et sociales, fondées sur le respect, la solidarité et l’éthique. (…)

Il est temps de construire un monde plus fraternel, fondé sur la solidarité entre les peuples. »

Berthe Darras



http://viacampesina.org/fr



Changer le monde ! Le slogan de la 7e conférence internationale de la Via Campesina ne laisse aucune ambigüité sur le sens de notre regroupement. Nous nous unissons pour défendre nos droits paysans, nous résistons aux attaques de l’agrobusiness, en cela nous cherchons à survivre, mais au- delà de cette résistance, nous nous organisons pour une transformation qui change globalement le mode d’être ensemble de l’espèce humaine.

Pour cela, nous cherchons des alliés, nous cherchons à amener la préoccupation pour la souveraineté alimentaire à se développer dans les autres secteurs de la société, qui ne sont liés à la filière alimentaire que par son extrémité finale, les mangeurs. Et pourquoi les mangeurs ne pourraient-ils pas façonner le monde dans lequel ils vivent, vu qu’ils forment le 100 % de la population ? De plus, il n’y a pas si longtemps, eux-mêmes ou leurs parents étaient encore paysans. Un mirage leur a fait penser que la vie serait plus facile en ville, mais pour quelques bonheurs nouveaux auxquels ils ont eu réellement accès, combien de cauchemars ils doivent maintenant affronter, divisés, parce que ces bonheurs et ces cauchemars se vivent seuls ! A partir de là, pour reconstruire une action collective, il faut sortir de ces rôles de producteurs et consommateurs individuels dans lesquels nous sommes cantonnés, créer des alliances locales avec des organisations urbaines, des associations de quartier, des communautés villageoises pour construire ensemble la souveraineté alimentaire.

Ici, dans nos régions très urbanisées du nord, nous devons donc trouver des formules pour donner plus d’ampleur à ce que les anglophones appellent « agriculture soutenue par la communauté », et que nous pourrions, en faisant un pas supplémentaire vers une disparition de la division entre producteurs et consommateurs renommer « agriculture organisée par la communauté ».

Dans de nombreuses régions rurales des pays du sud, la souveraineté alimentaire est mise en pratique dans le cadre de territoires populaires, notamment en Inde et en Amérique Latine, mais là-bas aussi, sans une alliance avec les populations urbaines, ces espaces ne pourront pas opposer de vraie résistance au rouleau compresseur de l’exploitation industrielle des terres et des êtres vivants qui y habitent.

Accompagnant cette construction par en bas, nos organisations travaillent à inscrire les principes de la souveraineté alimentaire au niveau étatique: au Népal, elle a été inscrite dans la constitution, et elle pourrait l’être l’année prochaine en Suisse.

La Via Campesina se donne aussi comme mission d’aider à construire, avec son expérience, une internationale des mouvements populaires.

Parallèlement à ces alliances nécessaires à d’autres secteurs de la société avec lesquels construire ce mouvement, la Via Campesina continue son extension géographique. Des organisations paysannes partageant nos valeurs nous ont rejoint ou sont sur le point de le faire : une organisation palestinienne, une organisation marocaine et une autre de Tunisie ont été accueillies à Derio, posant les bases d’une nouvelle région Nord de l’Afrique et Moyen-Orient, s’ajoutant aux 9 régions structurant le travail de la Via Campesina. Par ailleurs, une organisation australienne a rejoint la région Asie du Sud-Est et de l’Est. Pour ce qui est de l’Europe, plusieurs organisations des pays de l’Est, fortement touchées par l’accaparement des terres, étaient présentes à la 7e conférence, et c’est une des priorités de notre région d’accompagner les mouvements paysans dans ces pays jusqu’à aujourd’hui quasi absents de la Via Campesina.

Nous nous sommes engagés à continuer, en retournant dans nos régions, à lutter localement pour la souveraineté alimentaire et contre les politiques libérales, pour un mouvement paysan libéré de ses pratiques patriarcales et soutenant ses jeunes, contre l’accaparement des terres, pour nos semences paysannes, contre l’agrobusiness et les agrotoxiques, à construire nos modèles paysans agroécologiques, seuls à mêmes d’enrayer le changement climatique, et à exprimer notre solidarité pour les peuples en lutte, en envoyant rapidement lorsque la situation l’exige des représentants de nos organisations sur le terrain.

Joël Mutzenberg, Semences de Pays



lundi, 18 septembre 2017
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Uniterre défend une agriculture paysanne. Mais de quoi parle-t-on au juste ?

L’agriculture paysanne est le modèle d’avenir que nous défendons face à l’impasse d’une industrialisation croissante de l’agriculture. Pour certains, l’agriculture paysanne rime avec petite paysannerie, comme le message du Conseil Fédéral sur l’initiative sur la souveraineté alimentaire l’affirme à plusieurs reprises. La taille d’une ferme n’est cependant pas un critère dans la définition de l’agriculture paysanne. Dans le même message, le Conseil Fédéral propose cette définition : « paysan signifie que l’agriculteur et sa famille accomplissent eux-même une part importante des travaux nécessaires ».Cette définition n’est pas assez complête. L’initiative sur la souveraineté alimentaire propose d‘inscrire le terme « d’agriculture paysanne rémunératrice et diversifiée » dans la Constitution. Cette idée sous-entend un ancrage au territoire, une certaine autonomie du système agricole, une économie circulaire et la récupération d’une part de la valeur ajoutée dans les premiers maillons de la chaîne.


Des associations de paysans en France

Crée en 1984, la FADEAR (Fédération des Associations pour le Développement de l’Emploi Agricole et Rural) réunit des paysans et des paysannes pour majorité membres de la Confédération Paysanne, et d’autres acteurs du monde rural dans un objectif de partage de leur expérience et de leurs savoir-faire pour permettre de maintenir et d’installer des paysans et des paysannes nombreux et de faire vivre les valeurs de l’agriculture paysanne.


La charte de l’agriculture paysanne

En 1998, la Charte de l’Agriculture Paysanne a été finalisée par la FADEAR. Elle est issue de plusieurs années de travail entre paysan-ne-s et chercheurs et propose un modèle agricole permettant à des paysans nombreux de vivre de leur métier décemment et de façon durable et de produire pour nourrir leurs concitoyen-ne-s et non de produire pour produire. L’agriculture paysanne s’organise autour de 6 thèmes interdépendants : l’autonomie, la répartition, le travail avec la nature, le développement local, la qualité, la transmissibilité.

  • Répartir les volumes de production afin de permettre au plus grand nombre d’accéder au métier et d’en vivre.
  • Etre solidaires des paysan-ne-s des autres régions d’Europe et du monde.
  • Respecter l’environnement en partant du principe : « On n’hérite pas la terre de nos parents, on l’emprunte à nos enfants. »
  • Valoriser les ressources abondantes et économiser les ressources rares.
  • Rechercher la transparence dans les actes d’achat, de production, de transformation et de vente des produits agricoles.
  • Assurer la bonne qualité gustative et sanitaire des produits.
  • Viser le maximum d’autonomie dans le fonctionnement des exploitations agricoles.
  • Rechercher les partenariats avec d’autres acteurs du monde rural.
  • Maintenir la diversité des populations animales élevées et des variétés végétales cultivées.
  • Raisonner toujours à long terme et de manière globale.


Diagnostic Agriculture Paysanne

La FADEAR propose également un diagnostic sur la base d’une grille d’analyse des exploitations qui permet de situer chaque ferme par rapport au projet d’agriculture paysanne. Les fermes sont analysées à partir des six thèmes transversaux :

  • L’autonomie analysée selon trois critères : l’autonomie décisionnelle, l’autonomie économique et financière et l’autonomie technique.
  • La répartition des volumes de production. Le projet d‘agriculture paysanne régule l’accès à la production en fonction de la demande afin de permettre au plus grand nombre d’accéder au marché.
  • Le travail avec la nature. On y trouve cinq critères : la biodiversité à travers des assolements comportant des espèces aux caractéristiques et exigences agronomiques variées. La gestion de la fertilité par la recherche de modes de culture et d’élevage qui maintiennent voire améliorent la fertilité des sols. La gestion des produits phytosanitaires et vétérinaires dont l’usage doit être raisonné plutôt que basé sur des traitements systématiques. La protection des ressources en eau concerne la gestion en terme de quantité, de mode de prélèvement pour l’irrigation et de conservation de la qualité. La gestion de l’espace et des risques de pollution afin de veiller à la gestion respectueuse des espaces naturels et structures paysagères.
  • La transmissibilité illustre principalement les dimensions sociales et économiques de l’agriculture. Avoir une ferme transmissible, c’est permettre à quelqu’un de la reprendre, de vivre de son activité, donc de maintenir des paysans nombreux sur l’ensemble du territoire. La transmissibilité des fermes est une condition essentielle pour répondre aux attentes de la société concernant l’emploi, la qualité des produits, le dynamisme de la vie rurale. Les éléments à prendre en compte pour faciliter la transmissibilité sont les suivants : la vivabilité dans la ferme, la sécurité vis-à-vis du foncier, l’adaptabilité de la ferme, la viabilité économique de la ferme, la valeur de l’outil à transmettre.
  • La qualité des produits. La qualité des produits est multiple et se décline en différents aspects, qualité sanitaire, qualité chimique, qualité nutritionelle et qualité gustative. Certaines normes bactériologiques sont aberrantes ou excessives, en tout cas inadaptées à l’agriculture paysanne. Absence de polluants et d’OGM. Les OGM ne permettent pas aux paysans d’être autonomes, ne respectent pas la nature et n’ont pas prouvé leur innocuité pour le consommateur. La qualité des produits doit être reconnue et identifiable, tant sur les différents plans évoqués que sur celui des modes de production, car de celle-ci découle la reconnaissance du producteur, sa rémunération et sa satisfaction personnelle. Elle implique également le respect du consommateur à travers la transparence de l’acte de production. La transparence signifie être en mesure d’ouvrir les lieux de production, de transformation et de commercialisation de sa ferme et de son environnement. Elle s’applique à l’ensemble de la filière. Elle va au-delà de la certification ou de la traçabilité des produits.
  • Le développement local et la dynamique territoriale : L’implication du paysan, de la paysanne dans la vie locale est un gage de dynamique territoriale. Les partenariats dans la production et la commercialisation instaurent une plus grande solidarité entre les différentes catégories socioprofessionnelles et sociales. Ils permettent de fixer localement la valeur ajoutée. De par la nature même de son activité, l’agriculture est un lieu d’accueil, d’insertion et d’équilibre de la société. Par ailleurs, l’histoire et la culture paysanne sont une source de développement et de mise en valeur du territoire. Si l’agriculture n’est plus la seule activité du monde rural, elle en demeure un moteur essentiel. La disparition de 30 000 à 40 000 emplois par an en agriculture va à l’encontre de la préoccupation principale de la société : le maintien et la création de l’emploi. Contribuer à la création d’emploi, c’est d’abord maintenir des emplois existants par une meilleure répartition des volumes de production.


L’autonomie, la répartition et le travail avec la nature comptent chacun pour 20 % alors que la qualité des produits, le développement local et la transmissibilité comptent pour 13 % chacun. Grâce à des indicateurs qualitatifs ou quantitatifs mesurables sur une exploitation, l’ensemble constitue une grille globale d’analyse des systèmes de production et permet de les situer par rapport à la démarche vers l’agriculture paysanne. L’objectif de l’évaluation est de réfléchir aux moyens, individuels ou collectifs de progresser, afin de mettre en place une agriculture qui soit dans l’intérêt de toute la société.

Rudi Berli



Pour des informations plus détaillées :

www.agriculturepaysanne.org/files/charte-agricultu...