Lundi 14 octobre à 10h30 : manifestation - Genève- Vienne, droits pour les peuples, règles pour les multinationales, stop ISDS
Où: Place des Nations Unies
Mardi 15 octobre à 19h30: conférence publique - ensemble contre les sociétés transnationales et l'industrie des murs: les luttes des migrants, des mouvements de femmes et palestiniens
Où: Université de Genève, UNI-Mail, salle MR 280, boulevard du Pont d'Arve 40.
Jeudi 17 octobre à 19h30: conférence publique - Justice climatique, industries fossiles, mines et impunité des multinationales
Où: Université de Genève, UNI-Mail, salle MR 280, boulevard du Pont d'Arve 40.
Difficile de parler de souveraineté alimentaire sans évoquer la multiplication des semences et la sélection de variétés adaptées à l’agriculture paysanne. L’ASPSP (l’association sénégalaise des producteurs de semences paysannes), organisatrice de la 6ème édition de la foire ouest africaine des semences paysannes, pose le débat avec comme fil rouge de l’événement: Souveraineté alimentaire – quel rôle pour la semence?
De Genève à Djimini
Nous sommes deux jardinièr-e-s de l’association Semences de pays, travaillant dans le canton de Genève, à nous être déplacé-e-s à Djimini, en haute-Casamance, à l’occasion de cette foire.
Depuis 2009, nous sélectionnons et multiplions des variétés de légumes issues de sélections paysannes. Le projet comporte des dimensions sociales, politiques et agroécologiques: de nos pratiques culturales à des projets avec des maraîcher-e-s, nous soutenons une démarche de souveraineté alimentaire. Nous réfléchissons à de nouvelles formes de système semencier, nous permettant de reconquérir et de gagner notre autonomie vis-à-vis des grandes industries, de nous réapproprier les choix variétaux et la multiplication des semences, au niveau local. Pour ce faire, nous nous inspirons de différentes formes existantes, à l'image d'un système initié il y a une dizaine d'années en Haute-Savoie par des maraîcher-e-s qui s’organisent pour produire en commun leurs graines dans le cadre d’une maison de semences.
L’ASPSP travaille depuis 13 ans à la création d’un réseau de semences paysannes au niveau national et international. Elle est constituée de producteur-trice-s et valorise les systèmes d’échange existants dans les communautés paysannes. Nous avons à apprendre de son travail et de ces systèmes semenciers paysans.
Face aux multinationales, il est nécessaire de s’organiser et de se renforcer entre militant-e-s, à travers des moments departage de pratiques et d’expériences. C’est dans cette optique que nous nous sommes rendu-e-s à Djimini.
Précisons que plusieurs langues étaient utilisées durant ces trois jours: le Moré, le Français, le Wolof et le Pulaar pour celles traduites lors des moments formels. Nous ne comprenions pas les langues majoritairement utilisées par les participant-e-s lors des moments informels.
Diversité des moments d’échanges et d’organisation politique
La base constituante de la foire est l’échange de semences, impressionnant de par son importance. Cet échange est formalisé à travers des fiches, sur lesquelles les données du/de la donneuse/donneur et celle du/de la receveur/receveuse sont inscrites, ainsi que le nom de la variétés et des renseignements liées à sa culture. Ces informations sont récoltées par l’ASPSP, afin de répertorier les variétés paysannes. Nous avons vu de nombreuses variétés de mil, riz, petit mil, sorgho, ainsi que des variétés de maïs, oseille, gambo, arachide, niébé, d’aubergines et pour finir quelques variétés de tomates et de piments. Chaque variété porte soit le nom de la personne qui a commencé à la diffuser, soit celui du village d’origine. Ce fonctionnement permet de retracer son chemin.
Ces semences viennent toutes de la sélection paysanne, c’est à dire issues d'un travail de sélection et de multiplication qui remonte parfois à plusieurs générations.s. Elles sont amenées par des collectifs ou organisations paysannes, actives dans la promotion de l’agriculture paysanne familiale et de l’agroécologie.
Cet échange permet de mettre en circulation des variétés paysannes. Dynamique indispensable à l'existence et à la qualité de la biodiversité cultivée, ellemet en connexion des paysan-ne-s multiplicateur-trice etleur permet de trouver de nouvelles variétés et d’échanger sur leur pratique de multiplication et de sélection. Nous avions amené quelques semences, ce qui nous a permis de prendre part à l’échange et de comprendre son importance : c’est un lieu de diffusion essentiel pour les semences paysannes, qui seront réellement utilisées dans la production.
En définitive, cet échange s’inscrit dans les pratiques des paysan-ne-s que nous avons rencontrées. Dans leur région, ils/elles produisent leurs propres semences (principalement de céréales) ou/et les échanges avec leurs voisin-e-s. Comme l’a souligné une paysanne de l’ASPSP: «la semence paysanne est une semence communautaire»; ces pratiques, complété par des échanges locaux, nationaux ou régionaux, forment les systèmes semenciers paysans autonomes basé sur la confiance. Ils sont mis en péril par les semences certifiées. Lors de cette foire, des propositions sont faitesafin de les renforcer. Par exemple, la construction de «cases de semences», qui permettent de mieux conserver les semences, de mettre à disposition les variétés paysannes de la région et de mieux les répertorier.
A côté de cet échange, plusieurs espaces ont permis de débattre et d'échanger sur les savoirs et les luttes paysannes, à travers des conférences,des ateliers et des animations culturelles. De notre coté, nous avions proposé de la documentation sur des luttes paysannes d’autres pays (Colombie, Inde, etc.) qui soulevait les questions de la pollution des eaux, des sols et de l’air par l’installation des multinationales, de la lutte contre les OGM et pour la préservation de l’environnement dans le but de maintenir une souveraineté alimentaire et une culture paysanne locale.
Le premier jour de la foire, s’est tenue une pièce de théâtre, en français, crée par la troupe de théâtre forum Kaddu Yaraax, de Dakar. Elle ouvrait le débat, avec humour, sur les réglementations touchant aux semences paysannes, et plus particulièrement sur leur vol par les multinationales. Les spectateurs et spectatrices ont pu réagir, et condamner le comportement de certains personnages. Il en est ressorti une méfiance vis à vis des scientifiques, plus particulièrement blancs et occidentaux.
La question de la place de la recherche scientifique dans les luttes paysannes pour la souveraineté alimentaire est centrale. Plusieurs fois, il a été mis en avant que les paysan-ne-s sont des «chercheur-euse-s» dans leur champ, et que leurs savoirs et pratiques sont mis en péril par la recherche scientifique et ne sont pas considérés dans le cadre institutionnel. Il en émane un autre questionnement fondamental: comment se protéger et lutter contre les grandes entreprises semencières, qui s’accaparent les semences paysannes et qui disposent d’un important arsenal judiciaire et législatif (notamment via le brevetage)?
Plusieurs modes de lutte cohabitent pour répondre à cette problématique : d'une organisation locale, permettant aux communautés paysannes de se renforcer, à une voie plus légale pour une reconnaissance des semences paysannes hors du système de propriété intellectuelle. La loi Tirpaa (Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture) a fait par exemple le sujet d’une conférence. Plusieurs paysann-ne-s déplorent d'ailleurs par le manque d’engagement et de mise en pratique de ce traité au Sénégal.
Plus concrètement, une lutte qui nous a particulièrement intéressée était celle portée par le mouvement «Nous Sommes la Solution» (NSS), lancé initialement par douze femmes leader paysannes. Nous avons pu rencontré une militante active dans ce mouvement, Mariama Sonko, qui nous a expliqué son organisation et ses objectifs. NSS est présent dans sept pays: le Ghana, le Burkina Faso, le Mali, la Guinée-Bissau, la Guinée-Conakry la Gambie et le Sénégal. Lancé en 2011 à travers une campagne pour la promotion de la paysannerie familiale, il rassemble maintenant plus de 500 associations de femmes paysannes. Elles travaillent autours de trois objectifs:
- promouvoir le savoir et les pratiques hérités des ancêtres qui ont toujours servis à soutenir la souveraineté alimentaire
- influencer les décideur-eu se-s pour la prise en compte de la pratique agroécologique dans la politique national agricole
- valoriser les produits issus de l’agriculture paysanne et de l’agroécologie
Elles s’organisent au niveau local, national et international et les différents projets de luttes sont reliés grâce à des comités de pilotage composés de coordinatrices. Leur structure leur permet d’être efficace, et de faire circuler facilement les informations entre des localités éloignées.
Etant les premières concernées par l’alimentation de leur famille et communauté, les femmes sont à même d’identifier les problématiques liées à la nourriture et de proposer des solutions pour atteindre l'autonomie . De la multiplication de semences à la transformation de produits, le travail qu’elles réalisent donne des outils concrets pour atteindre la souveraineté alimentaire. Par exemple, elles ont élaboré deux types de bouillon, l’un à base de crevettes et l’autre à base de néré, une légumineuse. Elles les présentent comme une alternative et une résistance aux cubes Maggi ou Jumbo, qui se sont imposés dans la grande majorité des plats de leurs pays.
Pour finir, Nous Sommes la Solution propose également des perspectives de luttes féministes : à travers des formations et la constitution de réseaux visant à enrichir les savoirs des femmes et la possibilité de générer des revenus, une des femmes rencontrées témoigne de la position d’autorité qu’elle et ses camarades ont pu acquérir dans leur village.
Durant ces trois jours, nous avons pu créer des liens avec différent-e-s militant-e-s, avec qui nous partageons des bases communes, comme la nécessité d’utiliser des variétés paysannes pour atteindre une indépendance semencière. Grâce à ces rencontres, nous sommes rentré-e-s avec quelques graines dans les poches, une bonne bouteille de miel, du bouillon et une confiance renforcé-e-s dans nos valeurs et actions.
par Olivia et Marlène, Semences de Pays
Photos: Eline Muller
La Commission Internationale d'Uniterre (CIU)
La Commission Internationale d'Uniterre (CIU), est une commission qui fait partie de notre syndicat paysan et qui s'occupe principalement de solidarité internationale, notamment en venant en soutien à certaines organisations également membres de La Via Campesina ou en offrant un appui technique aux délégations qui visitent Genève à l'occasion du processus de la Déclaration des droits des paysan-ne-s à L'ONU. La CIU, qui est également membre de la Fédération genevoise de coopération, mène aussi un projet pour la souveraineté alimentaire au Sud. Depuis 2016, elle travaille au Sénégal avec l'ASPSP, l'association sénégalaise des producteurs de semences paysannes, une association faîtière qui regroupe une trentaine d'organisations paysannes. Le projet commun, qui se déroule dans quatre régions distinctes du territoire sénégalais, vise à développer l’intégration des semences paysannes aux démarches agroécologiques. Plus d'informations sur le projet ici. Chaque année l'ASPSP organise une foire des semences, une fois sous-régionale comme cette fois-ci, une fois nationale comme l'année passée. C'est dans ce cadre qu'une petite délégation suisse, composée de membres de Semences de Pays et d'une personne de la CIU, volontaire pour fournir un soutien technique à ASPSP ont eu la chance de participer à la foire des semences paysannes de Djimini, un grand moment de la lutte pour la souveraineté alimentaire en Afrique de l'Ouest.
Les accords de paix entre FARC-EP et le gouvernement colombien devraient mettre fin au conflit armé « interne » le plus ancien du monde qui a causé des centaines de milliers de victimes et des millions de personnes déplacées. Le paramilitarisme et le trafic de drogue se sont développés à grande échelle en connivence avec les gouvernements successifs et la répression militaire était féroce. Les origines du conflit étaient les justes et ancestrales revendications des populations rurales et communautés indigènes pour l’accès aux terres agricoles, la justice sociale et la participation démocratique à la gestion du pays et ses ressources.
La Via Campesina est mandatée par les signataires des accords de paix pour l’accompagnement du processus de paix signé le 24 novembre 2016 à Bogotá sur le point 1, relatif à la réforme rurale intégrale, qui est en relation directe avec le point 4 concernant le remplacement des cultures d’usage illicite. Ce mandat s’exerce conjointement avec le PNUD (Programme des Nations Unies pour le développement), la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) et l’UE (Union Européenne).
Si la Via Campesina s’implique dans la mise en œuvre des accords de paix c’est bien parce nous sommes une organisation de base paysanne et que plusieurs organisations paysannes et syndicales colombiennes sont partie prenante du processus.
La Via Campesina a organisé une première délégation internationale en septembre 2016 pour soutenir les accords de paix. Fin novembre 2017, une seconde délégation de vingt-six personnes, composée de délégué-e-s de 19 pays s’est rendue sur place pour se rendre compte des avancées du processus de paix et pour recueillir les témoignages des populations rurales, paysannes et communautés concernées. Les délégué-e-s ont sillonné cet immense pays et se sont rendus, outre dans la capitale Bogotá, siège du gouvernement et du parlement, dans cinq régions du pays (Arauca, Meta, Cauca, Caquetá et Nariño) qui ont été gravement touchées par le conflit armé.
La délégation a pu constater que les accords de paix négociés pendant plus de 4 années à La Havane sont accueillis avec espoir et soulagement ! La fin de la guerre est ressentie comme étant un tremplin essentiel vers une société plus juste qui devrait mettre fin aux inégalités sociales criantes et la pauvreté, et comme l’avènement d’une participation démocratique et la fin de la violence institutionnelle.
Malgré tout, le désenchantement et le découragement sont perceptibles car, un an après la signature des accords de paix, les engagements pris ne se concrétisent pas sur le terrain :
En bref, ce sont principalement les populations et communautés rurales qui ne voient pas d’améliorations : la réforme agraire n’avance pas, les terres promises ne sont pas mises à disposition ni légalisées, la pression sur les terres par l’agriculture industrielle et les exploitations minières s’accentue. La répression contre les producteurs de cultures illicites (coca, chanvre) reste violente sans que le remplacement de ces cultures se fasse d’une manière concertée. Les voies d’accès pour la commercialisation de la production agricole sont insuffisantes et l’absence d’infrastructures de santé est flagrante. L’insécurité augmente car le vide créé par la démobilisation des FARC a fait place à la présence de bandes armées Plis de cent vingt leaders communautaires et paysans, syndicalistes et ex-combattants ont été assassinés depuis un an sans que les responsables aient été traduits en justice.
La délégation a en outre constaté les lenteurs administratives, le retard des programmes de développement et la réticence de la majorité de droite parlementaire à voter les lois qui découlent des accords de paix. Les futures élections législatives et présidentielles de mars et mai 2018 ne laissent pas augurer le soutien déterminé nécessaire.
La Via Campesina pour sa part s’engage à diffuser ses observations auprès des organisations pour appuyer la mise en œuvre d’une économie agricole et paysanne dans le cadre des accords de paix, à soutenir le processus sur place par la formation de personnes à l’agroécologie, la création de banques de semences, à organiser des brigades internationales et à favoriser des jumelages avec des communautés paysannes, indigènes et espaces territoriaux de formation et réincorporation des FARC-EP.
Si le processus de paix réussit et si les droits humains sont rétablis, la Colombie pourra servir de modèle à tout le continent latino-américain et au reste du monde.
Genève, le 16 janvier 2018, pour les membres européens de la délégation, Philippe Sauvin
Soirée publique «Conserver et promouvoir le Droit aux semences pour les paysan-ne-s ; expériences pratiques au Sud et au Nord»
Jeudi 18 mai 2017 au Palais Eynard à Genève
Soirée publique dans le cadre de la mobilisation «Ensemble pour la Déclaration des Droits des Paysans à l’ONU»
Les vidéos de la soirée ont été réalisées par Justice5continents
[pour un meilleur visionnement, utilisez Firefox]
Depuis le début des années 2000, La Via Campesina a initié un processus pour obtenir une Déclaration internationale sur les droits des paysans reconnue par l'ONU.
Entre 2002 et 2008, le processus était d'abord interne : identifier les violations systématiques de nos droits dans les différents pays en réalisant plusieurs rapports co-rédigés par La Via Campesina, FIAN et Cetim. Cela nous a amené à préparer une première déclaration venant du milieu paysan qui a été adoptée par La Via Campesina en 2009.
Découvrez plusieurs interviews de paysannes et paysans.
Une brochure éditée par la Plateforme Souveraineté alimentaire, avec le soutien de la FGC
C'est au début des années 2000 que le syndicat paysan indonésien (SPI) a accepté d'être le leader du processus des droits paysans au sein de La Via Campesina. Les 3 délégués présents à Genève expliquent ce que cela a représenté.
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