L'année internationale des sols touche à sa fin. Et après?
Rappelez-vous, 2015 a été décrétée année internationale des sols. 12 mois pour convaincre les gouvernements et la population que cette ressource naturelle est à protéger. Force est de constater que cette année n'a pas eu le même retentissement que la précédente sur l'agriculture familiale. Nous sommes en droit de nous poser la question de l'efficacité d'une telle démarche. Les gouvernements ont-ils pris des résolutions fermes pour protéger le sol, ressource naturelle «non renouvelable»?
Pourtant le sol abrite plus de 25% de la biodiversité mondiale, c’est le support indispensable qui permet de produire au quotidien de la nourriture. Il est également utile à la filtration de l’eau et s’avère, lorsqu’il est ménagé, être un véritable piège à carbone contribuant ainsi à l’atténuation des effets de l’activité humaine sur le climat.
Par quoi le sol, ce support vivant que nous travaillons, sur lequel nous marchons, est-il menacé? Par l’extension mal contrôlée du bâti et des infrastructures, par une agriculture intensive responsable de la déforestation, du compactage du sol ou de sa pollution par les engrais, herbicides ou pesticides. Il est aussi mis en danger par une répartition inéquitable des terres dont fait partie le phénomène aujourd’hui bien connu de l’accaparement des terres essentiellement profitable à l’agroindustrie qui ne cesse de croître et impacte aussi nos régions, notamment les pays de l’Est. Pourtant, permettons-nous de rappeler que plus de 70% de l’alimentation mondiale est produite par l’agriculture paysanne sur seulement 25% des terres cultivables. Quelle efficacité en comparaison de l’agriculture industrielle! Voici une piste à explorer d’autant que certains experts prévoient que nous n’aurons plus que la moitié des terres arables à disposition à l’horizon 2050.
Dans un pays comme le nôtre, si peuplé et occupé à 25% par des surfaces dites improductives, à 30% par les forêts et à un peu moins de 10% par le bâti et les infrastructures, la convoitise sur les terres agricoles qui représentent 33% de la surface totale est particulièrement marquée. Nous perdons d’ailleurs chaque seconde près d’un m2 de terres agricoles. Parmi celles-ci, 40% sont des surfaces d’assolement (SDA) qui sont censées être particulièrement choyées car considérées comme les meilleures terres du pays. Il n’empêche, un grand chantier se dessine à l’horizon. Suite à l’avortement du projet de seconde révision de la loi sur l’aménagement du territoire, le Conseil fédéral annonce publiquement, à la veille du 5 décembre, journée internationale des sols, qu’il a décidé que les SDA ne feront plus partie de la révision et seront traitées séparément. Un groupe de travail composé des offices fédéraux, des cantons et des milieux concernés devrait remanier le plan sectoriel des SDA datant de 1992 et le Conseil fédéral l’adoptera au mieux en 2018. Si une discussion de fond s’impose au vu de l’interprétation très fédéraliste de la protection des SDA, il est à craindre que la pression de certains cantons souhaitant avoir les coudées franches pour développer leurs infrastructures ne sonne le glas d’une protection indispensable de cette ressource qui, une fois imperméabilisée, est définitivement perdue.
En 2016, nous passerons à l’année internationale des légumineuses. Un thème encore une fois qui mériterait toute notre attention. Ces plantes qui fixent l’azote sont précieuses dans la rotation des cultures et une source alimentaire pour les Hommes comme pour les animaux. Mais la zone d’approvisionnement en légumineuses n’a eu de cesse de migrer: de l’Amérique latine à la Chine puis au pays de l’Est. La Suisse pourrait augmenter son taux d’auto-approvisionnement en légumineuses. En ce sens, quel est le rôle des stations fédérales de recherche et celui des politiques publiques de la Confédération en vue d’offrir une chance à ces cultures sur notre territoire? Espérons que ces questions recevront réponse l’an prochain.