Gilles Roch du domaine des Biolletes à Ballans a été un des premiers agriculteurs du canton de Vaud à produire des légumes biologiques. En raison de demandes de certains de leurs clients, lui et ses parents ont décidé, à la fin des années 80, de changer leur méthode de production et de réduire les traitements chimiques.
Ils ont commencé par mettre 10 de leurs 30 hectares en culture biologique. C’était un début difficile car à l’époque il n’existait aucune formation, il fallait trouver des solutions dans les livres et par leurs nombreuses expériences personnelles. En outre, le compost n’était pas de la même qualité qu’aujourd’hui car il contenait du plastique et des grands morceaux de bois: «On avait plutôt l’impression de polluer nos terrains en mettant du compost». Il lui a fallu jusqu’à huit ans pour remettre de la vie dans le sol qui avait souffert des traitements chimiques pendant des années.
Dès 1998, l’entreprise de la famille Roch était une petite centrale de distribution avec conditionnement qui travaillait quasiment exclusivement pour les grands distributeurs. Lorsqu’ils ont perdu leurs gros clients en 2003 et 2005, Gilles et son épouse Pascale ont compris que l’entreprise était très vulnérable de par sa dépendance à la grande distribution. Ils se sont mis à la vente directe et ont créé le marché des Biolettes.
Ils sont aujourd’hui présents aux marchés de Nyon, Morges et Lausanne et composent des paniers de légumes pour «le jardin potager», une coopérative d’agriculture contractuelle de proximité qui a été fondée en 2005 pour promouvoir la souveraineté alimentaire. «Tout ce qu’on fait, on le fait avec le respect du sol, mais après c’est aussi le respect de la filière jusqu’au consommateur».
Avec le temps, la surface du domaine a augmenté de 20 à 50 hectares, et on y cultive aujourd’hui une centaine de variétés de légumes, du blé, du seigle, de l’épeautre et du colza. De plus, on y produit des semences de céréales pour l’Association suisse des sélectionneurs (ASS). Pour trouver des niches de marché, Gilles fait souvent des essais avec différentes variétés de légumes, comme par exemple le chou frisé Catherine de Russie ou des carottes coniques -roses à l’extérieur et jaunes à l’intérieur- avec lesquelles il a eu beaucoup de succès auprès de ses clients.
Il s’intéresse également aux pratiques de la permaculture, mais il pense qu’il n’est pas possible d’appliquer cette méthode sur des grandes surfaces. «Il faudrait que les gens qui s’intéressent à travailler la terre viennent et que chacun -ou une petite famille- ait un bout de terrain et vive en autarcie ici, tout en faisant autre chose à côté le reste du temps. Mais ce n’est pas fait pour les agriculteurs qui sont de moins en moins disponibles, car il y a de plus en plus de travail sur les fermes. On peut le faire à petite échelle pour apprendre par observation, et le fait que la permaculture existe va nous donner des idées afin d’améliorer notre manière de cultiver».
A l’avenir, Gilles souhaite encore améliorer sa manière de travailler sur l’exploitation afin d’augmenter son niveau d’autonomie, et diminuer la pollution. Il aimerait par exemple installer des panneaux solaires sur le toit du hangar afin de produire l’électricité pour les frigos, qui sont très gourmands en énergie. Il espère que des machines agricoles électriques vont arriver bientôt sur le marché.
Regula Guevara, Pissenlit