mercredi, 30 mars 2016

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Le « syndicat paysan parlons de système Uniterre » et « l'autre syndicat », deux organisations membres de La Via Campesina, ainsi que plus de 70 organisations alliées, permettent à la Suisse d'amorcer enfin un débat salutaire sur nos politiques agricoles et alimentaires. En effet, avec plus de 109'655 signatures validées par les communes sur les 131'600 reçues, nous sommes heureux de pouvoir annoncer l'aboutissement de cette première étape.

 

 

Les thèmes autour de l’agriculture durable, rémunératrice, respectueuse du climat et libre d’OGM pourront enfin être abordés avec sérieux. Plusieurs intervenant-e-s se sont succédés pour réaffirmer les points forts de cette initiative.

Fernand Cuche a ouvert les feux en parlant de la nécessité d’engager une transition agricole : « Avec le dépôt de 4 initiatives en un an et demi concernant l’agriculture, le pays engage une nouvelle et profonde réflexion concernant l’avenir du monde rural. C’est surprenant pour un pays qui tous les 4 ans ouvre un débat et prend de nouvelles décisions sur le plan national. Cet engouement révèle l’escamotage d’enjeux essentiels qui n’échappent plus à une partie grandissante de la population ».

Ulrike Minkner, vice Présidente d’Uniterre, a rappelé l’importance de préserver l’agriculture paysanne locale et rémunératrice. « Si nous préservons cette agriculture, ici et dans le monde entier, qui a un lien ave le sol et qui est adaptée aux spécificités locales, nous allons surmonter toutes les crises, car elle est flexible et a la capacité d’utiliser les ressources vivantes, telles que les animaux et les plantes de façon durable avec l’aide du soleil et du sol ».

L’indispensable volet social de ce texte est rappelé par Philippe Sauvin de l’autre syndicat et de la plateforme pour une agriculture socialement durable : « notre initiative demande une rémunération et des conditions de vie dignes autant pour les employé-e-s agricoles, souvent issu-e-s de la migration, que pour les agricultrices et les agriculteurs. D’autre part, elle revendique plus de personnes actives dans la production alimentaire ; elle place les êtres humains au coeur du débat alimentaire ».

Lorsque nous évoquons les systèmes alimentaires, il est impossible de passer outre la question des semences et des OGM. Luigi D’Andrea, secrétaire exécutif de l’Alliance suisse pour une agriculture sans génie génétique précise que : « pour répondre aux cinq défis que sont le déclin de la  biodiversité en général et de l’agrobiodiversité en particulier, les changements climatiques, la faim et la malnutrition, la pauvreté et l’eau, les semences occupent une position centrale. La possibilité d’avoir un accès aux ressources génétiques est la condition sine qua non pour résoudre ces défis. La bonne nouvelle est que les solutions existent et que nous n’avons pas besoin d’OGM pour produire, mais d’agroécologie et de paysans ; c’est pourquoi un changement de paradigme est nécessaire ». 

Il est évident qu’il ne suffit pas de produire de la nourriture pour que le système alimentaire soit adéquat. Il faut que cela soit fait en adéquation avec les attentes de la population. C’est pourquoi notre initiative souhaite que les circuits courts soient encouragés. Sieglinde Lorz, active dans l’association d’agriculture contractuelle de proximité « Radiesli » à Berne, nous l’explique : « L’agriculture contractuelle avec ses circuits courts, régionaux et durables nous rapproche de notre base vitale et nous rend moins dépendants de l’argent et des aléas du système volatil de l’économie mondiale. Les productrices et les producteurs ont une assurance quant au salaire pour leur travail. Les consommatrices et les consommateurs peuvent participer au choix des légumes à cultiver et la qualité des aliments leur est garantie. Les risques sont partagés. Des liens se créent et se consolident, la compréhension mutuelle s’améliore. La dépendance est remplacée par l’entraide. La souveraineté est encouragée et renforcée de part et d’autre ».

« La vie paysanne a des qualités et des besoins spécifiques, que les lois commerciales mondialisées tendent à détruire. Une parole à contre-courant, une défense de ces qualités et de ces besoins, doit urgemment leur être opposée », salue encore Pierre Farron, représentant de « Eglise et Monde du Travail ».

Les interdépendances mondiales sont une réalité et loin de nous l’idée de nous isoler du monde. Les échanges commerciaux sont utiles, pour autant qu’ils demeurent secondaires et ne soient pas pratiqués de manière débridée et que le libre-échange règne en maître. Nous souhaitons que les échanges commerciaux internationaux soient plus équitables et respectent nos agricultures paysannes respectives plutôt que d’encourager l’agrobusiness. Fabian Molina, Président des Jeunes socialistes suisses l’affirme : « Cette initiative est une nécessité pour une agriculture suisse plus écologique, un butoir contre la menace de la dictature des multinationales et un pas vers la solidarité internationale »

Enfin, la conférence de presse a été conclue par la lecture d’une prise de position de La Via Campesina, mouvement paysan international regroupant plus de 160 organisations à travers 70 pays et près de 300 millions de paysannes et paysans: « Depuis plusieurs années nous avons vu fleurir des initiatives en faveur de la reconnaissance de la souveraineté alimentaire à différents niveaux. Mais il est très difficile de parvenir à ce que les textes officiels ne dévoient pas la souveraineté alimentaire de son sens exacte. Pour cette raison, La Via Campesina salue avec enthousiasme l’initiative portée par deux de ses membres, Uniterre et l’autre syndicat, qui avec le soutien d’une large alliance pour la souveraineté alimentaire sont parvenus à proposer un texte prenant un compte l’ensemble des dimensions de la souveraineté alimentaire ; l’enjeu est de taille. Quand la souveraineté alimentaire avance sur un coin du globe, c’est l’ensemble de notre mouvement qui avance ».

 

 

>> Photos du dépôt de l’initiative - Berne - 30 mars 2016