mardi, 18 décembre 2018
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Le 16 décembre, le Conseil Fédéral a signé l'accord de libre-échange avec l'Indonésie. Ainsi, il ignore la pression de l'opinion publique qui exigeait d'en exclure l'huile de palme. Une pétition lancée par la « coalition sur l'huile de palme » dont Uniterre fait partie, signée par plus de 20'000 personnes, avait demandé de l'exclure d'un tel accord. Six initiatives cantonales formulaient la même exigence. Mais le gouvernement n'en a pas tenu compte, en effet les droits de douane devront baisser d'environ 30%, alors que ces derniers n'avaient déjà pas empêché d'importer jusqu'à 60'000t d'huile de palme par année. Aujourd'hui la Suisse importe de 30 à 40'000t d'huile de palme.

La production d'huile de palme se fait dans des monocultures ayant un effet néfaste sur l'environnement et constitue la première cause de déforestation en Indonésie. Elle chasse les paysan.ne.s de leur terre en les transformant en ouvriers des grandes compagnies d'huile de palme. La certification de la table ronde sur la production durable d'huile de palme (RSPO) est un alibi mis en place par l'industrie sans aucune force contraignante et avec des critères de durabilité qui n'ont de durable que leur inefficacité.

Avant la libéralisation commerciale, l'Indonésie exportait du riz alors, qu'aujourd'hui, elle est obligée d'en importer près de 2 millions de tonnes. Plus de 20% de la population indonésienne souffre de malnutrition sévère. Dans ce contexte, le président Jokowi avait fait des promesses d’autosuffisance alimentaire à la Coalition populaire pour la souveraineté alimentaire pendant la campagne présidentielle de 2014. En dépit de ces déclarations d'intention, cet objectif est foulé aux pieds par une politique qui favorise l'industrie d'exportation. Les actions gouvernementales se ressemblent. Ainsi, en Suisse, l'huile de palme menace également la sécurité alimentaire en mettant en péril la culture du colza.

Alors que les Chambres ne se sont pas encore prononcées, le Conseil fédéral applique la méthode du fait accompli. C'est un déni par rapport aux engagements pris en faveur du développement durable et un mépris de l'article 104a sur la sécurité alimentaire qui préconise que, dans le cadre des relations commerciales internationales, la Confédération doit créer les conditions nécessaires au développement durable de l'agriculture et de l’industrie alimentaire, et que les bases de la production agricole doivent être garanties. Comment le Conseil Fédéral pourra-t-il démontrer qu'il entend appliquer la Constitution ?

Il ne reste qu'à freiner cette folle course vers l'abîme par une mobilisation populaire et Uniterre se mobilisera de toutes ses forces pour porter ce débat devant le peuple.

Rudi Berli, co-directeur d'Uniterre