Le travail et les humains
Est-ce que tu peux en vivre ? C'est la question qu'on me pose régulièrement quand je parle de mon travail en tant que paysanne. Non, ce n'est pas possible. J'ai un petit salaire d'appoint chez Uniterre (rédaction et mise en page du journal). Ce n'est pas une exception, c’est la règle. Le rapport agricole 2020 dit à ce sujet : « Dans les régions des collines et des montagnes, le revenu réalisé hors de l'agriculture constitue une part plus importante du revenu total (34 %) que dans la région de pleine (28 %). » Conclusion : Pour de nombreuses fermes, le revenu réalisé hors de l'agriculture constitue une part importante du revenu total, à hauteur d'un tiers environ. Dans mon cas, je peux réaliser le travail pour Uniterre depuis chez moi, c'est idéal. Je n'ai pas besoin de me rendre ailleurs et en général et je peux choisir le moment qui me convient le mieux. La plupart des paysannes et des paysans n'ont pas cette chance. Iels doivent organiser leur journée à la minute près : il faut gérer les animaux, les enfants, la cuisine, les cultures, les machines, la vente directe et le travail à l'extérieur de façon à ce que tout le monde soit satisfait, sans oublier les relations au sein de la famille, celles avec les employé.e.s et les contacts sociaux en général.
J'aimerais me pencher plus particulièrement sur les femmes. Il y en a qui travaillent en dehors de la ferme et dont les revenus complètent celui de la ferme. Dans de nombreux cas, elles ont quand-même la charge du ménage et de la garde des enfants. Il y a des femmes qui ne travaillent que sur la ferme et d'autres encore qui partagent leur temps de travail. Il n'y pas de norme, mais nous avons un point commun : des journées bien remplies.
Par ailleurs, le rapport agricole confirme une autre tendance : le nombre de fermes diminue, tandis que la taille des fermes restantes s'accroît. « En 2019, la Suisse comptait au total 50 038 exploitations, soit 814 de moins que l'année précédente (-1,6 %). En 2000, il y en avait encore 70 537. » En revanche, la taille des exploitations et des machines a augmenté. Derrière ces chiffres, il y a des humains et des destins. Si les fermes s'agrandissent, alors que le nombre d’actifs diminue, cela a des conséquences. Souvent, ces fermes sont très endettées et le travail se fait dans la solitude – on ne peut pas parler de nos soucis ou du manque de perspectives avec les machines, les robots et les ordinateurs.
Au sein d'Uniterre, nous discutons beaucoup, nous organisons et critiquons, nous nous impliquons et nous formulons des demandes pour une agriculture viable et tournée vers l'avenir, pour la préservation de nos moyens de subsistance communs. Pour poursuivre notre travail, nous avons besoin de vous toutes et tous. Et nous attendons avec impatience les moments d’échanges, vos interventions créatives et votre soutien financier et intellectuel pour la nouvelle année.
Ulrike Minkner paysanne et secrétaire d’Uniterre
et exige dans une lettre ouverte au Parlement indonésien un NON à la ratification de l'accord. La société civile locale voit les emplois et les moyens de subsistance de nombreux Indonésiens menacés. Aujourd'hui, 16 ONG indonésiennes se sont prononcées contre le projet d'accord de libre-échange avec les pays de l'AELE.
L'ALE engage l'Indonésie à une protection plus stricte de la propriété intellectuelle, qui va au-delà des règles de l'OMC. Cela concerne en particulier l'accès aux médicaments. L'expérience d'autres accords de libre-échange montre que ce sont principalement les industries pharmaceutiques et agrochimiques qui bénéficient de telles dispositions. En conséquence, les médicaments deviennent plus chers pour la population indonésienne.
La protection plus stricte des variétés de semences (norme UPOV91) rend largement impossible la sélection et l'échange de ses propres semences. Cela représente une menace fondamentale pour l'agriculture paysanne et la sécurité alimentaire, notamment parce que le prix des semences pourrait être multiplié par quatre. Un règlement, soit dit en passant, que même les États de l'AELE ne mettent pas pleinement en œuvre.
L'ALE menace également les moyens de subsistance de 2,7 millions de pêcheurs et pêcheuses, puisque 80 % des exportations de poisson de la Norvège vers l'Indonésie seront exemptées de droits de douane. En 2017, les exportations norvégiennes de produits de la pêche ont déjà atteint une valeur de 250 millions de dollars.
Kartini Samon de l'organisation GRAIN exprime son inquiétude : "Le rythme de la destruction de l'environnement qui menace tant de vies et les moyens de subsistance des gens, juste pour accommoder quelques magnats et multinationales est inquiétant. Les gens sont déplacés, il y a tellement de catastrophes climatiques qui se produisent ici : feux de forêt, inondations, sécheresse. Dans le même temps, les menaces contre les communautés, les militants et les journalistes qui remettent en cause cet état de fait se multiplient. Tout cet accaparement de terres et cette destruction de l'environnement sont légalisés par des lois et règlements et des accords de libre-échange".
Les 16 organisations signataires concluent que l'accord n'apportera pas de bénéfices économiques concrets, mais qu'il fera courir à l'Indonésie le risque de perdre ses richesses naturelles et sa biodiversité. En fait, cet accord porte préjudice à la majorité des Indonésiens, écrivent les organisations dans leur lettre. C'est pourquoi, avec les ONG indonésiennes, nous demandons un NON à l'accord de libre-échange !
Communiqué de presse du comité Stop huile de palme du 12 février 2021
En décidant le 25 janvier 2021 de soutenir l'accord de libre-échange avec l'Indonésie, l'Union suisse des paysans (USP) compromet la sécurité alimentaire dans un contexte où la durabilité n'est pas garantie !
L'ALE avec l'Indonésie met en vitrine une prétendue durabilité, mais ce n’est qu’une escroquerie à large échelle : la déforestation et la culture sur brûlis, le pillage des ressources minières, la destruction de la biodiversité, le déplacement des communautés indigènes et agricoles, l'utilisation de pesticides toxiques, l'exploitation et le travail des enfants restent la règle. Les vagues clauses de durabilité ne peuvent pas être défendues devant une cour d'arbitrage internationale. En plus, il n'existe pas de mesures de contrôle ni de sanctions efficaces.
Les normes suisses n'ont rien en commun avec les normes indonésiennes. Les demandes et les exigences en matière de bien-être animal, de protection de la biodiversité, des sols et de l'eau pour l'agriculture domestique sont croissantes. L'huile de palme bon marché compromet, en Suisse et en Indonésie, la durabilité économique, sociale et écologique de l'agriculture paysanne.
La pression sur la production suisse d'oléagineux va augmenter et compromettre la répartition nécessaire et urgente de la valeur ajoutée entre les acteurs des filières. Avec 1 CHF/kg, l'huile de palme est de loin l'huile végétale la moins chère et la plus produite sur le marché mondial. Le prix de l'huile de colza et de tournesol domestique est de 2,60 CHF/kg. Sur le prix de l'huile de palme s'ajoutent 1,28 CHF/kg de droits de douane, ainsi que 0,14 Fr. de fonds de garantie. Avec la réduction tarifaire moyenne de 35% prévue par l'accord de libre-échange (ALE), cela se traduit par une réduction de 0,40 CHF/kg sur le prix de 2,42 CHF/kg. En d'autres termes, avec un prix de 2,02 CHF/kg, l'huile de palme est considérablement moins chère. Cela aura un impact négatif sur des milliers d'agriculteurs et agricultrices. La réduction tarifaire de 35% concerne 12 500 tonnes d'huile de palme, ce qui représente près de la moitié de toutes les importations d'huile de palme en Suisse. De plus, ce cadeau tarifaire est une incitation certaine à la surexploitation en Indonésie et à la maximisation des marges de l'industrie alimentaire.
Des normes de durabilité fortes, contraignantes et gouvernementales sont nécessaires pour garantir une concurrence loyale et des systèmes alimentaires durables. La combinaison des normes de durabilité avec des réductions tarifaires massives conduit à la fausse conclusion que la durabilité ne coûte rien et crée un précédent dangereux pour tous les futurs accords de libre-échange en augmentant les volumes d'importation et les réductions tarifaires. Rudi Berli, secrétaire du syndicat paysan Uniterre, critique : "En liant libre-échange et durabilité, l'association suisse des paysans fait un marchandage malhonnête avec Economiesuisse et le SECO. L’USP contrevient gravement à sa propre initiative sur la sécurité alimentaire en ne prenant pas la durabilité au sérieux ".
Au lieu de promouvoir l'approvisionnement durable en denrées alimentaires régionales, nationales et européennes, de renforcer la souveraineté alimentaire et l'agriculture rurale, le commerce mondial est stimulé, ce qui a de graves conséquences pour les populations, le climat et l'environnement.
Communiqué de presse du 26 janvier 2021
Communiqué de presse Uniterre
Des paysans protestent vivement à l’annonce de la demande d’importation de lait frais destiné au trafic de perfectionnement par la fromagerie Imlig – Agri du 15.01.2021
Malheureusement cette annonce ne nous surprend même pas. Elle étaye ce que nous dénonçons à Uniterre depuis des années ! Le système actuel est tellement retors qu’il pousse les industriels à fabriquer ce fromage pour l’exportation, un fromage qui n’a aucune valeur ajoutée et qui :
- entre en concurrence déloyale avec nos fromages à haute valeur ajoutée qui sont exportés.
- entre en concurrence déloyale même avec les fromages produits par les pays vers lesquels nous l’exportons.
- profite du Swissness sans aucun mérite.
- détourne illégalement les primes pour la transformation fromagère, primes qui sont censées être versées aux producteurs. C’est du vol que même nos autorités ne sanctionnent pas.
En 2019, la Suisse a exporté 6064 t de « Switzerland Swiss » (cf. schéma ci après), ce fromage de la colère qui profite avec sa dénomination même doublement du Swissness…!
Nous ne dénonçons pas directement la fromagerie Imlig, qui n’est que victime d’un système opaque, malhonnête, qui dure depuis bien trop longtemps.
De plus, la diminution du nombre de producteur.trice.s, qui commence à entrainer une diminution de la production, n’y est aussi pas pour rien. En effet, tous les voyants étaient au vert en 2020 pour enfin espérer une augmentation significative du prix du lait de centrale, suite à la pénurie de beurre ayant conduit à un volume d’importation total de 4’800 tonnes. C’est la loi de l’offre et de la demande : quand l’offre manque, les prix sont censés augmenter. Et pourtant, cette augmentation de prix n’a été que dérisoire, pour ne pas dire inexistante.
Nous sommes sûrement passés sous la barre des 19’000 producteur.trice.s de lait à fin 2020 (19’048 à fin 2019).
Il est grand temps que les représentants des producteur.trice.s à l’Interprofession Lait (IP Lait) prennent le taureau par les cornes pour exiger :
- l’arrêt de ce système mafieux de production de fromages indutriels pour l’exportation ;
- la valorisation du lait Suisse dans le segment A, pour une fabrication de produits indigènes, comme le beurre, dont on manque cruellement ;
- une augmentation SIGNIFICATIVE du prix du lait, si nous voulons encore croire à une production de lait de centrale en Suisse à l’avenir !
La commission lait d’Uniterre
Contact presse : Philippe Reichenbach : 079 640 89 63
Pour rappel : la prime fromagère
Tous les transformateurs reçoivent une prime de 10,5 cts pour le lait transformé en fromage. L’objectif de cette prime était de stabiliser le prix du lait industriel après la libéralisation du marché fromager (juin 2007). Cette prime ne devrait être attribuée que sur du lait payé au prix du segment A. Une partie du lait de centrale transformée en fromage est prise sur le segment B (10 à 13%, soit 150 à 200 000 tonnes de lait) et cette prime fromagère est également touchée sur ce lait segment B. De nombreuses fromageries artisanales transmettent cette prime correctement aux producteurs. Par contre, certains grands acheteurs et transformateurs contournent cet objectif par une application opaque de la segmentation, ce qui empêche les producteurs de savoir exactement quel est le prix réel de leur lait.
Selon une analyse de la Recherche Agronomique Suisse*, entre 60 et 100 millions de francs par an ne reviendraient pas aux producteur.trice.ss, comme c'est prévu selon la loi (art. 6 let.b de l’Ordonnance sur le Soutien du prix du Lait (OSL) et art. 38 de la loi fédérale sur l’agriculture (Lagr)). (Somme totale : 293 millions de francs par an).
Résultat : au final, ce lait ne coûte que 35 cts aux transformateurs qui ne reversent pas la prime fromagère aux producteur.trice.s (Prix segment B, moyenne 2019, 45 cts) ! C’est pour cela que des milliers de tonnes de fromages à pâte mi-dure sont exportées aux alentours de Fr 3.-/kg. Cette situation a été tolérée par l'OFAG durant des années.
* Analyse de l’impact sur le marché laitier du supplément pour le lait transformé en fromage, Listorti G., Tonini A.,Recherche Agronomique Suisse 5(5), 212-215, 2014
La composition des fromages exportés a radicalement changé depuis la libéralisation avec l’UE en 2007 (année de mise en place de la prime fromagère). En plus d’une décennie, les quantités d’Emmentaler AOP à l’export ont baissé de 52 % alors que pour la première fois en 2017, le Gruyère AOP a devancé l’Emmentaler AOP. Le segment AOP représente 34% de toutes les exportations. Dans le même temps, tout un segment de fromages à pâte mi-dure et dure (zone orange de l’illustration, Raclette Suisse et Switzerland Swiss inclus) a considérablement augmenté pour représenter 41% de toutes les exportations.
Source : La filière laitière en Suisse, AGRIDEA, 2018
Avec la consultation annoncée du 18 décembre 2020 sur l'ordonnance sur l'importation d'huile de palme produite de manière durable en provenance d'Indonésie, le Conseil fédéral fixe entre autres la norme d'importation RSPO Segregated. Les faits montrent pourtant que cette certification n’offre pas les garanties suffisantes : ¾ des plantations de palmiers à huile certifiées RSPO en Indonésie sont situées sur d'anciennes zones forestières. Les directives de la RSPO n'empêchent pas la destruction des tourbières et des forêts tropicales humides riches en biodiversité. Enfin, des pesticides hautement toxiques pourront continuer d’y être utilisés.
Le comité référendaire reste convaincu que cet accord va dans la mauvaise direction et ne fera qu’accroitre les conséquences dramatiques de la surproduction d’huile de palme. Rappelons-nous les énormes superficies qui sont aujourd’hui déjà victimes de l'avidité pour l'huile de palme : 17 millions d'hectares de terres, soit une superficie quatre fois plus grande que la Suisse.
Cependant, cet accord ne concerne pas seulement l'huile de palme, qui est très controversée. L'Indonésie est un pays au cœur de la compétition mondiale pour l’accès aux ressources naturelles. Ce pays connait une militarisation croissante et un durcissement de ses législations. Par ailleurs, on y rapporte de graves violations des droits de l'homme : violence contre les militants, expropriation de paysans, déplacements de populations.
En outre, cet accord, instaurant une libéralisation du secteur bancaire, ainsi qu'une protection plus stricte de la propriété intellectuelle sur les brevets de médicaments et surtout sur la protection des variétés végétales pour les semences, favorisera les entreprises mondiales. Pour le conseiller national Nicolas Walder (les Verts – GE) : « Cette ordonnance est largement insuffisante pour atténuer les effets négatifs de cet accord. Les dispositions relatives à la protection des brevets rendront l’accès aux semences plus difficile et feront augmenter le prix des médicaments pour la population indonésienne. Par ailleurs, comme pour l’accord de libre-échange avec la Chine, aucune sanction n’est prévue en cas de violation des droits humains. C’est irresponsable !». Ce cadre fait d’autant plus défaut que le Parlement indonésien a adopté, le 5 octobre 2020, la loi omnibus prévoyant des mécanismes de déréglementation à large échelle dans le domaine du droit du travail et de l'environnement.
Willy Cretegny, producteur de vin biologique et initiateur du référendum, ajoute que "La réduction des droits de douane sur l'huile de palme et la promotion du libre-échange mettent en danger la durabilité. Le mandat constitutionnel reste méconnu en Suisse comme à l'étranger. Il est contradictoire de relever les exigences de durabilité du système agricole et alimentaire suisse et de précariser en même temps la production en imposant une pression croissante sur les prix en raison de la réduction des droits de douane sur l'huile de palme".
Communiqué de presse : Comité Stop huile de palme
Deux ans après l'adoption de la Déclaration des Nations unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales (UNDROP), il reste encore beaucoup à faire pour mettre en œuvre et garantir les droits qu'elle énonce. Le Pacte Vert, la stratégie "De la Ferme à la Table" (F2F) et les plans stratégiques de la PAC sont le point de départ.
Uniterre
travaille avec une coalition suisse d’ONG pour que la UNDROP soit mise
en oeuvre dans les politiques suisses dont la politique agricole 22+.
Pour la Coordination Européenne Via Campesina (ECVC), les objectifs de la stratégie "De la Ferme à la Table" et du "Pacte Vert" européen ne peuvent être atteints qu'en intégrant des mesures claires pour mettre en œuvre l'UNDROP, y compris dans les plans stratégiques nationaux de la PAC. Les méthodes agroécologiques paysannes et l'agriculture familiale offrent des solutions toutes faites et éprouvées aux problèmes de climat et de biodiversité. De plus, une réorientation claire de la politique européenne en faveur de ces pratiques contribuerait à éviter les violations des droits de l’homme, ainsi que les difficultés économiques et sociales auxquelles font face les petites exploitantes agricoles, les travailleurseuses agricoles et migrantes, beaucoup de ces difficultés ayant été mises en évidence et exacerbés par la pandémie COVID19.
L'UNDROP représente une opportunité de transformer les systèmes alimentaires de manière holistique, avec la vision à long terme nécessaire pour lutter contre le changement climatique. Les droits présentés dans cette déclaration, s'ils sont respectés et utilisés comme cadre, permettraient à l'UE d'atteindre les objectifs du Pacte Vert. Pour ne citer que quelques exemples, la mise en œuvre correcte de l'article 14, visant à garantir des conditions de travail saines aux paysanes et aux travailleurseuses migrantes, aurait pu éviter les conditions de travail dangereuses des travailleurseuses des abattoirs et d'autres secteurs agroalimentaires en Europe lors de la récente pandémie.[i] D'autres sous-sections de l'article 14, relatives à l'utilisation et à la manipulation de produits chimiques toxiques et nocifs, ainsi que le droit aux semences paysannes traditionnelles souligné à l'article 19, sont essentielles pour atteindre les objectifs de l'UE en matière de réduction des pesticides et de prévention de la pollution des zones naturelles. [ii]Si les droits énoncés à l'article 17, relatifs à l'accès aux terres, à leur utilisation et à leur contrôle, étaient protégés, l'accaparement et la concentration des terres qui contribuent à des pertes importantes de biodiversité pourraient être combattus et l'UE pourrait se concentrer davantage sur l'agriculture de prochaine génération (un sujet clé de la conférence sur les perspectives agricoles, qui se déroule aujourd'hui). [iii]
Les parallèles évidents qui peuvent être établis entre les résultats de la bonne mise en œuvre de l'UNDROP et les objectifs du Pacte Vert et de la stratégie F2F soulignent le rôle important que les paysanes, véritable épine dorsale de l'agriculture européenne, doivent jouer dans la transition agricole urgente.
Cet outil juridique propose une feuille de route législative toute prête pour les institutions de l'UE et les États membres, afin de garantir que les objectifs fixés pour l'avenir de l'agriculture européenne puissent être atteints d'une manière efficace et démocratique, en ne laissant vraiment "personne pour compte". En outre, tant au niveau européen que national, les nombreuses organisations qui se battent depuis des décennies pour mettre en œuvre et garantir ces droits, telles qu'ECVC, ses organisations membres et ses alliées, peuvent offrir leur expertise sur les propositions politiques en vue d'un changement de paradigme et d'un véritable changement pour nos systèmes alimentaires et, par conséquent, pour la société et la planète. Le fait de se concentrer sur des solutions techniques et numériques purement orientées vers le profit favorise une plus grande intensification de l’agriculture (élevage intensif et monocultures), et permet à l'industrie alimentaire à grande échelle de maintenir le statu quo et de faire payer aux générations futures les coûts des impacts à long terme de ces modèles de production. Au contraire, il est maintenant temps de mettre en place des politiques alimentaires et agricoles équitables favorisant des économies saines et un modèle de production et de distribution équitable, qui garantissent le droit à une alimentation de qualité pour tous les citoyens.
L'UE doit veiller à ce que la stratégie "De la Ferme à la Table" soit conforme à la déclaration de l'UNDROP et utiliser ces outils, ressources et connaissances pour agir maintenant, avant qu'il ne soit trop tard.
Pour en savoir plus sur l'UNDROP et sur la manière dont sa mise en œuvre peut contribuer à atteindre les objectifs du Pacte Vert et de la stratégie "De la Ferme à la Table", vous pouvez consulter les ressources ci-dessous :
Lire l'UNDROP dans les différentes langues de l'ONU
Les principales demandes d'ECVC pour la stratégie "De la Ferme à la Table" (Farm to Fork)
[i] Article 14 1. Les paysans et les autres personnes travaillant dans les zones rurales, qu'il s'agisse de travailleurs temporaires, saisonniers ou migrants, ont le droit de travailler dans des conditions de sécurité et d'hygiène, de participer à l'application et à l'examen des mesures de sécurité et d'hygiène, de choisir des représentants en matière de sécurité et d'hygiène et des représentants dans les comités de sécurité et d'hygiène, de mettre en oeuvre des mesures visant à prévenir, réduire et maîtriser les dangers et les risques, d'avoir accès à des vêtements et équipements de protection adéquats et appropriés ainsi qu'à une information et une formation adéquates sur la sécurité au travail, de travailler sans violence ni harcèlement, y compris le harcèlement sexuel, de signaler les conditions de travail dangereuses et insalubres et de se soustraire aux dangers résultant de leur activité professionnelle lorsqu'ils ont des raisons de croire qu'il existe un risque imminent et grave pour leur sécurité ou leur santé, sans subir de représailles liées au travail pour avoir exercé ces droits.
[ii] Article 14 4. (a)-(e) et article 19.1-19.8
[iii] Article 17.6 Le cas échéant, les Etats prennent les mesures appropriées pour mener des réformes agraires afin de faciliter un accès large et équitable à la terre et aux autres ressources naturelles nécessaires pour assurer aux paysans et aux autres personnes travaillant dans les zones rurales des conditions de vie adéquates, et pour limiter la concentration et le contrôle excessifs de la terre, compte tenu de sa fonction sociale. Les paysans sans terre, les jeunes, les petits pêcheurs et les autres travailleurs ruraux devraient être prioritaires dans l'attribution des terres publiques, des pêcheries et des forêts.
Vidéos
Victoire massive alors que l’ONU adopte la Déclaration des droits des paysans !
Quel est l’impact de COVID 19 sur les producteurs de denrées alimentaires ?
La Valeur des choses
Ce journal fait écho à des conférences et ateliers qui se sont déroulés le 16 octobre dernier lors de la journée mondiale de l’alimentation. Les écueils du système agricole et alimentaire mondial et Suisse ont été mis en lumière : Tout d’abord la concentration du pouvoir aux mains de l’agroalimentaire et de la grande distribution ; le manque de transparence et l’inégale répartition des marges tout au long de la filière. Cette inégalité est renforcée par le fait que la grande distribution contrôle certaines voire toutes les étapes de transformation et de la distribution. Les faîtières négocient de grands volumes à des acheteurs qui tiennent le couteau par le manche. Il est en effet difficile d’exiger des prix plus élevés pour les paysan.ne.s lorsque que vous dépendez du bon vouloir d’un ou deux acheteurs qui de surcroit décident des volumes qu’ils sont prêts à commercialiser.
Les paysan.ne.s cultivent et/ou élèvent conformément aux réglementations, ils s’astreignent à produire selon des cahiers des charges stricts, qui soit dit en passant, posent des exigences qui contredisent la diversité du vivant : fruits, légumes et céréales standardisés, animaux devant atteindre un poids et une qualité de viande déterminés et du lait qui doit contenir des pourcentages définis de matière grasse et protéines ! Tout écart par rapport à ces critères est sanctionné par une baisse du prix au producteur.trice.
Pourtant la nature, c’est le contraire de la standardisation et de l’homogénéité. Mais c’est ce dont l’industrie a besoin et toute l’agriculture s’efforce à la satisfaire, mais à quel prix ?
Et justement, parlons de prix !
Le prix payé aux paysan.ne.s est indécent ! Il ne prend pas en compte le travail fourni ni les aléas qui influent sur la production (météo, ravageurs, etc.). Il est un frein à une transition vers une agriculture plus durable, mais surtout il nie le fait que les produits agricoles sont la base de nombreux emplois…sans produits agricoles, pas d’artisans transformateurs ! pas non plus de filières ! pas d’industrie alimentaire, pas de magasins… Le travail des paysan.ne.s permet la création et le maintien de nombreux emplois. Ce seul fait devrait parler pour des prix rémunérateurs !
Il faut une répartition équitable et transparente des bénéfices tout au long de la chaine de valeur. Un cadre doit être mis sur pied par la confédération, car selon la déclaration sur les droits des paysan.ne.s et des autres personnes travaillant dans les zones rurales, la Suisse a l’obligation de tout mettre en œuvre pour renforcer la position des paysan.ne.s lors des négociations (art. 9.3) et elle doit veiller à ce que les entreprises commerciales situées sur son territoire respectent et renforcent les droits des paysan.ne.s (art. 2.5). Michelle Zufferey, Secrétaire Uniterre
Communiqué de presse Uniterre
Le projet de loi du Parlement doit être rejeté car il propose des mesures insuffisantes. Uniterre demande que la Confédération mette en place des conditions cadres qui assurent le maintien de l'économie sucrière et de la production de betteraves. Elle doit agir au niveau des primes de culture et de la mise en valeur de la filière suisse, au niveau de la protection douanière (sucre et betteraves), ainsi qu'au niveau de la taxation des sucres alimentaires.
Afin d’assurer la sécurité d’approvisionnement en sucre suisse, il est nécessaire de maintenir et de renforcer la production indigène de betteraves sucrières ainsi que la filière de transformation et les emplois qui y sont liés. Cette production est très fortement menacée par la globalisation et un dumping sur les prix qui n’est possible que parce que les coûts de tous les impacts négatifs (climat, ressources, biodiversité ainsi que les coûts sanitaires et sociaux) sont externalisés. Le prix minimum à la production des betteraves sucrières répondant aux attentes de la population en termes de durabilité, se situe à 150 Fr/t. C'était d'ailleurs le niveau des prix dans les années 1990 ! Sous la pression de la dérégulation douanière, suite aux accords bilatéraux et commerciaux, le prix suisse à la production a chuté à 54 Fr/t.
Les primes actuelles à la production doivent donc être maintenues et les suppléments de primes pour la production biologique doivent être relevés de Fr 400.- par ha et par an et de Fr. 200.- par ha et par an pour la production intégrée.Par ailleurs, il appartient à l'administration fédérale compétente de définir l'homologation indépendante et sérieuse des produits insecticides, fongicides et herbicides pouvant être utilisés pour la production. La loi ne doit pas explicitement favoriser un type de production mais équilibrer les différences de coûts et de rendements.
Le projet de loi prévoit une taxation minimale de 70 Fr/t de sucre brut importé. Uniterre préconise de relever la taxe pour l'importation de sucre au niveau maximal autorisé par les accords de l'OMC, à savoir 610 Fr/t. Ceci permettrait une hausse de 40 Fr/t du prix à la production pour la betterave. On retrouverait ainsi le niveau de prix pratiqué en 2007. Ce niveau est toutefois insuffisant pour permettre une culture rémunératrice. Il convient donc de maintenir les primes à la culture pour compenser le manque à gagner entre le prix sur le marché protégé et un prix rémunérateur.
En ce qui concerne l'importation des betteraves, il faut une mise en place de phases d'importation ainsi qu'une taxation cohérente avec les objectifs visés : prix cible minimal 100.- Fr/t, taxation environ 75.-Fr/t. Cette mesure permettrait en même temps d'empêcher le dumping écologique par une production ne répondant pas aux mêmes exigences environnementales que la production indigène.
Des mesures de taxation des sucres alimentaires industriels pourraient financer la hausse des primes, sans grever le budget agricole. Comme le préconise l'OMS dans un rapport publié en 2016 (voir lien ci-dessous), il convient de taxer les sucres utilisés par l'industrie alimentaire dans le cadre de la stratégie de prévention de santé. Les fonds récoltés doivent être au moins alloués à 50% à la production de betteraves sucrières (financement de la prime de culture et financement de la recherche publique de systèmes de production durables sans insecticides et sans herbicides, recherche de nouvelles variétés résistantes, soutien aux nouvelles techniques aux producteurs), ainsi qu'à 50% à la santé publique. Une telle taxation est appliquée en Belgique et en France sans toutefois orienter les recettes fiscales de manière contraignante.
Ainsi une taxe de 900.- Fr/t sur le sucre utilisé dans l'industrie alimentaire rapporterait 330 Millions Fr. Pour le consommateur cette taxe signifierait une augmentation de 1 ct/l de boisson sucrée.
http://www.who.int/dietphysicalactivity/publications/fiscal-policies-diet-prevention/en/
Plus d’informations :
Rudi Berli, Uniterre (FR et DE) : 078 707 78 83
Suite à la mise en consultation du contre-projet du Conseil fédéral, en réponse à l'initiative populaire contre l'élevage intensif, Uniterre a élaboré une prise de position. Consensuel et très générique dans sa formulation, le contre-projet évite soigneusement la problématique des fermes-usines, mais propose de rendre obligatoire les programmes éthologiques SST (Système de stabulation respectueux des animaux) et SRPA (Sorties régulières en plein air) tout en renonçant purement et simplement de s'attaquer aux importations à bas prix et à leurs conséquences désastreuses pour les familles paysannes. Uniterre estime que ce contre-projet rate son objectif et n'apporte pas les solutions escomptées.
Entre attentes sociétales, impératifs écologiques et survie à long terme de la paysannerie suisse, la réflexion autour de l'élevage mérite de s'y attarder. Un sujet qui sera au cœur de notre travail dans les semaines à venir, et dont les résultats vous seront présentés au cours du printemps.
Uniterre partage la déception des initiant-e-s de l’initiative pour des multinationales responsables de ne pas avoir réuni une majorité en sa faveur. Ce résultat démontre que notre société se croit autorisée, au nom du profit, à fermer les yeux sur les agissements dévastateurs de certaines multinationales.
Les exigences de l’initiative seront mises en œuvre
Un nombre croissant de Suisses et de Suissesses sont d’avis qu’une multinationale ne peut engranger des bénéfices aux dépens des êtres humains et de l’environnement.
Les mobilisations à l’échelle mondiale pour que la déclaration universelle des droits de l’Homme soient réellement mise en œuvre s’intensifient. Et notre gouvernement, les décideurs et les acteurs économiques doivent reconnaître la primauté des droits humains sur toute loi, traité ou activité économique.
La Suisse a voté en faveur de la déclaration sur les droits des paysan.ne.s*** . et il est de son devoir de prendre « toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les acteurs non étatiques qu’ils sont à même de réglementer, tels que les particuliers et les organismes privés, ainsi que les sociétés transnationales et les autres entreprises commerciales, respectent et renforcent les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales. » (art. 2.5). Cela veut dire : le droit à une vie saine, à un niveau de vie décent, à un environnement sain, le droit à la terre, le droit à la justice, pour n’en citer que quelques-uns.
A Uniterre, nous recevons quotidiennement des informations de nos partenaires en Amérique latine, en Afrique et en Asie sur des agissements criminels de multinationales : accaparements de terres, pollutions, intimidations et violences, conditions de travail indécentes, etc. Comment est-ce possible de tolérer de tels actes ?
Nous poursuivons, avec les organisations suisses, européennes et La Via campesina, notre engagement afin qu’un cadre clair et contraignant soit mis en place, pour que cessent les violations des droits humains, la destruction et l’accaparement des terres et les contaminations de l’environnement.
La justice, l’équité, le respect, la solidarité plutôt qu’une économie basée sur l’asservissement et la destruction.
***Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysan.ne.s et des autres personnes travaillant dans les zones rurales (UNDROP)