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La Coalition pour des multinationales responsables, née de l'initiative du même nom, a lancé une pétition. Elle y demande l'adoption d'une loi sur la responsabilité des entreprises, comme l'avait promis la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter lors de la campagne de votation sur l'initiative. La Commission européenne ayant également présenté une telle loi cette année, la Suisse doit se dépêcher si elle ne veut pas être le seul pays européen à ne pas avoir formalisé sa responsabilité envers les multinationales !

Uniterre soutient cette pétition !

Concrètement, la pétition exige :

  • Un devoir de diligence raisonnable en matière de droits humains et de protection de l’environnement basé sur les risques et conforme aux standards internationaux (en particulier les Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits humains et les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales).
  • Une autorité de surveillance indépendante dotée de compétences étendues, sur le modèle du projet de directive de l’UE.
  • Une responsabilité civile adaptée au droit suisse pour les dommages relevant des droits humains ou de l’environnement qui auraient pu être évités par une diligence appropriée.

Signez et faites signez la pétition !!

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Réaction à la communication de ce jour de l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG)

Les recommandations de l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) publiées ce jour en vue du sommet des Nations Unies sur l’alimentation dans le monde sont superficielles, non contraignantes et donc insuffisantes. Huit organisations exigent qu’à l’avenir, la société civile et les paysannes jouent un rôle de premier plan dans la transformation globale des systèmes alimentaires.

L’OFAG revient aujourd’hui sur les dialogues multipartites suisses sur les systèmes alimentaires. Ces dialogues sont censés être la contribution au Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires (UNFSS), qui se tiendra en septembre à NewYork. Ce sommet fait partie de l’Agenda 2030 des Nations Unies pour la réalisation des objectifs de développement durable. Il ne vise rien de moins que la « mise en place des systèmes alimentaires du futur ».

Jelena Filipovic, coprésidente d’Agriculture du Futur, a participé au dialogue. A ses yeux, « il est illusoire de croire que les déséquilibres fondamentaux de pouvoir et les désaccords peuvent s’évaporer grâce à un ou deux brefs échanges entre des acteurs variés aux intérêts parfois contradictoires. »

La Confédération mise sur la participation pour donner forme aux systèmes d’alimentation du futur. Nous le saluons, mais de réelles transformations ne pourront avoir lieu que grâce à un processus de dialogue plus complet, qui intègre davantage la population et vise des changements d’ordre politique.

La situation au niveau mondial est encore plus critique : il apparaît de plus en plus clairement que l’UNFSS néglige des aspects aussi importants que les droits humains, en particulier les droits des paysannes, et préfère promouvoir des solutions techniques correspondant avant tout aux intérêts de l’agro-industrie.

Pistes non contraignantes

Les dialogues multipartites de l’OFAG n'ont mené qu’à des pistes d’action générales et non contraignantes. Les dialogues avec les villes étaient meilleurs, car ils ont débouché sur des mesures plus concrètes et prometteuses. En parallèle, la Direction du développement et de la coopération (DDC) a organisé son propre forum de discussion. Il est regrettableque l’administration fédérale ait mené des dialogues séparément car c’est en pensant ensemble les politiques intérieures et extérieures que l’on pourra finalement atteindre une politique globale cohérente.

Les organisations signataires s’engagent en faveur d’une agriculture visant le respect du droit à l’alimentation, libérée de la dépendance aux engrais chimiques et aux pesticidesqui rendent les sols stériles à moyen terme et mettent en danger l’environnement et la santé. Des études scientifiques et d’innombrables paysannes, au Sud comme en Suisse, ont prouvé que des formes d’agriculture agroécologiques sont efficaces. Ces alternatives restent néanmoins dans l’ombre en raison de mauvaises conditions-cadre politiques.

Le sommet à venir illustre bien la tendance : les multinationales ont une influence grandissante dans les processus décisionnels de l’ONU, au détriment des droits humains et de la justice sociale et donc également de la communauté internationale et de la société civile. « L’ONU perd en légitimité. Il est préoccupant de constater que ses agences confient la résolution des problèmes actuels des systèmes alimentaires aux entreprises qui ont contribué à les causer », affirme Simon Degelo, responsable semences et biodiversité chez SWISSAID.

Encadré UNFSS

L'UNFSS est organisé par l'ONU en partenariat avec le World Economic Forum (WEF) sur la base du vaste « cadre de partenariat stratégique » signé par les deux organisations en 2019. Ce cadre n’admet pas la participation des organisations d'agriculteurstrices et des organisations de la société civile. En revanche, il permet aux grandes entreprises et aux groupes liés à l'industrie d’exercer une influence considérable. En préparation de l'UNFSS, des « dialogues nationaux » sur les systèmes alimentaires ont lieu au sein de chaque Etat membre. Les solutions élaborées lors de ces dialogues (organisés en Suisse par l'OFAG et la DDC) sont censées alimenter le sommet de l’ONU.

Plus d'informations sur l'UNFSS et les critiques dont il fait l'objet :Nourrir le monde avec le Forum économique mondial (publiceye.ch)

Signataires: Uniterre, Swissaid, PPP, Public Eye, EPER, Agriculture du Futur, Greenpeace, Action de carême

Pour de plus amples informations:

Simon Degelo, SWISSAID, responsable semences et biodiversité, 076 824 00 46, s.degelo@swissaid.ch

Jelena Filipovic, Agriculture pour le Futur, coprésidente, 079 289 06 41,

jelena@landwirtschaftmitzukunft.ch

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40 organisations prennent position sur l’ordonnance relative au contre-projet indirect à l’initiative pour des multinationales responsables. Elles critiquent d’une même voix l’inefficacité de la proposition du Conseil fédéral. Dans le projet d’ordonnance, alors que le contre-projet est déjà largement critiqué, son champ d’application devient si limité que cette loi minimaliste s’apparente désormais à une farce.

En 2019, le Conseil fédéral a usé d’une manœuvre inhabituelle : il a monté un contre-projet de dernière minute qu’il a proposé en plein milieu des débats parlementaires au sujet de l’initiative pour des multinationales responsables, alors que ceux-ci duraient déjà depuis deux ans. Son objectif était d’empêcher qu’un compromis suffisant pour les deux parties ne soit adopté au Parlement et de faire croire à la population que l’initiative n’était plus nécessaire au regard de son contre-projet. Chantal Peyer, membre du comité de la coalition pour des multinationales responsables fait cette critique au nom des 40 organisations : « Le Conseil fédéral prévoit tellement d’exceptions et de conditions dérogatoires qu’il n’y aura pratiquement aucune entreprise qui ne devra remplir ses obligations de diligence raisonnable concernant le travail des enfants et les minerais de conflit. C’est un désaveu pour les citoyennes et citoyens, dont la majorité avait approuvé l’initiative pour des multinationales responsables. »

Aux yeux des organisations signataires, les points suivants sont particulièrement problématiques :

Minerais de conflit : les petits revendeurs douteux sont récompensés

  • Dans le domaine des minerais de conflit, le projet d’ordonnance du Conseil fédéral prévoit des seuils jusqu’auxquels les entreprises sont exemptées du devoir de diligence qui sont beaucoup trop élevés. Ainsi, une partie importante des minerais de conflit importés en Suisse n’y sera pas soumise. Marc Ummel de Swissaid précise : « L’or provenant de zones de conflit et extrait dans des conditions douteuses est généralement importé en petites quantités en Suisse. Si le seuil n’est pas revu à la baisse, ces petits revendeurs pourront poursuivre impunément leur commerce. »
  • De surcroît, bien qu’il n’existe pas de base juridique pour cela, les entreprises qui commercialisent des minerais recyclés sont a priori exemptées. « En ajoutant cette exception, le Conseil fédéral laisse libre cours à une pratique déjà courante qui consiste à importer de l’or recyclé pour en dissimuler l’origine douteuse », ajoute Ummel.

Travail des enfants : une incitation à détourner le regard

Dans le domaine concernant le travail des enfants, des entreprises encore plus nombreuses pourront échapper à toute responsabilité :

  • Les PME sont complètement exclues du projet d’ordonnance du Conseil fédéral, même si elles sont actives dans un domaine à hauts risques. Malgré les promesses, il n’est plus question d’une approche qui soit basée sur ces risques – alors que c’était ce qui était prévu dans la loi.
  • De plus, les grandes entreprises seront exemptées si la production finale de leurs produits a lieu dans un pays sans risques connus de travail des enfants. Si une entreprise suisse vend une chaussure "Made in Germany" (bien que ce ne soit que l'assemblage final qui ait lieu en Allemagne), elle ne doit remplir aucune obligation de diligence raisonnable. Pourtant, les composants de la chaussure pourraient bien avoir été produits avec le travail des enfants dans un pays tiers. Cela va complètement à l'encontre de l'esprit et de l'objectif de cette disposition.
  • Si, malgré ces deux premières dispositions, une grande entreprise n’a pas pu s’affranchir de son devoir de diligence sur le travail des enfants, l’ordonnance prévoit une troisième possibilité : s’il n’y a pas de « soupçon fondé » en ce qui concerne le travail d’enfants en relation avec un produit ou un service en particulier, il n’y a pas non plus besoin d’accomplir son devoir de diligence raisonnable. C’est une incitation inopportune : les entreprises qui ferment les yeux sur l’éventuel travail des enfants dans leur chaîne d’approvisionnement sont encouragées à ne rien changer à leurs pratiques. Finalement, seules les entreprises qui travaillent déjà de manière responsable sont soumises au devoir de diligence – et il s’agit généralement de celles qui ont déjà mis en place des mesures volontaires pour lutter contre le travail des enfants.

La Suisse fait cavalier seul

Durant la campagne, les opposantes et opposants à l’initiative pour des multinationales responsables ne se lassaient pas d’affirmer que leur contre-projet serait plus adapté au contexte international que l’initiative. Pourtant, cette loi prise dans son ensemble présente d’énormes défauts, à commencer par le choix de la restreindre arbitrairement à quelques thématiques et par l’absence totale de contrôles et de sanctions. En comparaison internationale, cette loi est en retard sur son temps avant même d’entrer en vigueur. La résolution du Parlement européen, la loi allemande sur les chaînes d’approvisionnement, la Loi de Vigilance en France, la Transparency Law en Norvège et les projets de loi en Belgique et aux Pays-Bas vont tous beaucoup plus loin et prévoient des contrôles étatiques, la responsabilité civile en cas d’infraction voire même des sanctions au niveau pénal. Danièle Gosteli Hauser d’Amnesty International Suisse est formelle : « La Suisse est clairement à la traîne et son manque de réglementation va perpétuer l’impunité dont jouissent les multinationales qui abusent des droits humains ou violent l’environnement. »

Les organisations signataires demandent au Conseil fédéral d’améliorer cette ordonnance et, pour ce faire, lui ont soumis des propositions concrètes. Mais il est clair pour elles que même la meilleure des ordonnances à ce contre-projet alibi ne sera pas suffisante au regard de la situation internationale. C’est pourquoi la coalition pour des multinationales responsables » continuera de s’engager en faveur d’une loi contraignante pour des multinationales enfin plus responsables.

Vous trouverez la réponse de la coalition pour des multinationales responsables » à la consultation de l’ordonnance du Conseil fédéral ici (en allemand) : https://konzern-initiative.ch/wp-content/uploads/2021/06/2021_vernehmlassungsantwort-vsotr_kvi-koalition_de_def.pdf

Les organisations suivantes soutiennent ce communiqué de presse

Action de Carême

Alliance Sud

Amnesty International Suisse

Arbeitsgruppe Schweiz-Kolumbien

Associazione consumatrici e consumatori della Svizzera italiana

Brücke - Le Pont

Bruno Manser Fonds

Campax

EcoSolidar

Fédération romande des consommateurs

Femmes protestantes en Suisse (FPS)

FIAN Suisse

Gebana

Greenpeace

GSsA

Guatemalanetz Bern

Helvetas Swiss Intercooperation

humanrights.ch

Juristes Démocrates de Suisse (JDS)

Justitia et Pax

Ligue suisse des femmes catholiques

Medico international schweiz

OeME-Kommission der Evangelisch-reformierten Gesamtkirchgemeinde Bern

Pain pour le prochain

Pain pour le prochain

Pro Natura

Public Eye

Save the Children

Société pour les peuples menacés

Solidar Suisse

Solifonds

StopArmut 2015 / Interaction

Swissaid

Terre des hommes schweiz

Travail.Suisse

TRIAL International

Union syndicale suisse

Unité

Uniterre

En accordant des concessions douanières massives sur l'huile de palme, l'accord de libre-échange avec l'Indonésie signé par la Suisse neprofite qu'aux négociants de matières premières et à l'industrie agro-alimentaire.

Alors qu'en septembre 2019, 300'000 ha de forêts tropicales étaient en feu en Indonésie, il est incompréhensible que la Suisse favorise l'extension du commerce d'huile de palme.

Les importations d'huile de palme bon marché mettent sous pression la production indigène de tournesol et de colza.

Nous voulons dénoncer le rôle des entreprises de sociétés de trading avec les matières premières alimentaires tel que l'huile de palme. Pour quatre sociétés d'entre elles, toutes actives à Genève, à savoir Cargill, Bunge, Louis Dreyfuss Company et Olam elles engrangent à elles seules des bénéfices annuels de 220 Mrds de dollars. Cette somme équivaut au PIB de l'ensemble des 40 pays les plus pauvres.

Selon le principe du pollueur-payeur, nous leur adresserons aujourd'hui une facture pour les coûts sociaux et environnementaux qu'elles causent.

Parallèlement nous lançons notre campagne de financement participatif pour la campagne sur l'huile de palme, car nous devons compter sur nos propres moyens pour que cette question puisse être soumis à une votation populaire.

Lien vers le site : https://wemakeit.com/projects/stop-huile-de-palme

Pour plus de renseignements :

Rudi Berli, président Uniterre Genève, (fr/de), 078 70 77 883

Willy Cretegny, Nouveau Radical, (fr), 079 626 08 25

www.stop-huile-de-palme.ch


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Malgré la qualité exceptionnelle de leur production de vins, les vignerons suisses subissent une concurrence étrangère toujours plus forte qui aboutit à une situation catastrophique pour le secteur viticole. En juin, l'Association suisse des viticulteurs et encaveurs indépendants (ASEVI) a soumis au Conseil Fédéral un catalogue de mesures urgentes et à long terme pour assurer l'avenir de la production viticole indigène.

La mesure la plus importante consiste en une adaptation rapide du contingent d'importation fixé en 1996 à 170 millions de litres sur une base de 310 millions de litres de consommation. Cette consommation s'élève aujourd'hui à 275 million de litres. Il est dès lors cohérent d'abaisser le contingent d'importation à 130 millions de litres. C'est une mesure que le Conseil Fédéral peut prendre immédiatement sans remettre en cause les traités commerciaux signés. Le commerce et les importateurs doivent enfin s'adapter au marché ! Les taxes hors contingent tarifaire doivent être réadaptées afin de limiter les distorsions de concurrence.

Par ailleurs, les contingents d'importation doivent être attribués en fonction de la prise en charge de produits indigènes, comme c'est le cas dans la filière viande par exemple.

Dans le cadre du commerce transfrontalier enfin, la franchise doit être abaissée de 5 à 2 litres de vin par jour et par personne. Parmi les mesures urgentes, l'ASEVI demande une aide au stockage pour l'encavage de la récolte 2019, une dénonciation immédiate de la dérogation "Swissness" pour la fabrication de fondues avec du vin étranger et un fonds de crédit-relais pour éviter des faillites et de défauts de paiement.

Pour toute réponse, le gouvernement préconise de voir l'augmentation de la concurrence comme une chance et de se satisfaire d'un éventuel renforcement de la promotion. La Suisse, qui signe des traités sur le climat, le rapport agricole mondial et la Déclaration sur les Droits paysans, pour ne citer que ces documents officiels, devrait être plus cohérente, et mettre en œuvre sa Constitution et ses lois qui l'obligent à préserver la production et l'approvisionnement indigène.

D'autre part, il est scandaleux de judiciariser un dossier de politique agricole, dont la consultation est encore ouverte dans le cadre de la PA 22+, à savoir le dossier des contrôles de cave. Cette ordonnance très largement critiquée met les vignerons-encaveurs dans le même panier que les acheteurs, vendeurs et importateurs de vins étrangers, et leur demande les mêmes contrôles administratifs ! Toutes les organisations agricoles ont refusé cette ordonnance absurde et plus d'une centaine de recours ont été déposés par des vignerons-encaveurs. Résultat : Le gouvernement se cache derrière l'administration et veut intimider la contestation par des sanctions financières et juridiques, par le biais d'avances et de frais dissuasifs. L'ASEVI exige l'annulation immédiate des menaces financières et une reprise du dialogue dans le cadre de la consultation sur la PA 22+.

Article de Rudi Berli.



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Difficile de parler de souveraineté alimentaire sans évoquer la multiplication des semences et la sélection de variétés adaptées à l’agriculture paysanne. L’ASPSP (l’association sénégalaise des producteurs de semences paysannes), organisatrice de la 6ème édition de la foire ouest africaine des semences paysannes, pose le débat avec comme fil rouge de l’événement: Souveraineté alimentaire – quel rôle pour la semence?

De Genève à Djimini

Nous sommes deux jardinièr-e-s de l’association Semences de pays, travaillant dans le canton de Genève, à nous être déplacé-e-s à Djimini, en haute-Casamance, à l’occasion de cette foire.

Depuis 2009, nous sélectionnons et multiplions des variétés de légumes issues de sélections paysannes. Le projet comporte des dimensions sociales, politiques et agroécologiques: de nos pratiques culturales à des projets avec des maraîcher-e-s, nous soutenons une démarche de souveraineté alimentaire. Nous réfléchissons à de nouvelles formes de système semencier, nous permettant de reconquérir et de gagner notre autonomie vis-à-vis des grandes industries, de nous réapproprier les choix variétaux et la multiplication des semences, au niveau local. Pour ce faire, nous nous inspirons de différentes formes existantes, à l'image d'un système initié il y a une dizaine d'années en Haute-Savoie par des maraîcher-e-s qui s’organisent pour produire en commun leurs graines dans le cadre d’une maison de semences.

L’ASPSP travaille depuis 13 ans à la création d’un réseau de semences paysannes au niveau national et international. Elle est constituée de producteur-trice-s et valorise les systèmes d’échange existants dans les communautés paysannes. Nous avons à apprendre de son travail et de ces systèmes semenciers paysans.

Face aux multinationales, il est nécessaire de s’organiser et de se renforcer entre militant-e-s, à travers des moments departage de pratiques et d’expériences. C’est dans cette optique que nous nous sommes rendu-e-s à Djimini.

Précisons que plusieurs langues étaient utilisées durant ces trois jours: le Moré, le Français, le Wolof et le Pulaar pour celles traduites lors des moments formels. Nous ne comprenions pas les langues majoritairement utilisées par les participant-e-s lors des moments informels.


Diversité des moments d’échanges et d’organisation politique

La base constituante de la foire est l’échange de semences, impressionnant de par son importance. Cet échange est formalisé à travers des fiches, sur lesquelles les données du/de la donneuse/donneur et celle du/de la receveur/receveuse sont inscrites, ainsi que le nom de la variétés et des renseignements liées à sa culture. Ces informations sont récoltées par l’ASPSP, afin de répertorier les variétés paysannes. Nous avons vu de nombreuses variétés de mil, riz, petit mil, sorgho, ainsi que des variétés de maïs, oseille, gambo, arachide, niébé, d’aubergines et pour finir quelques variétés de tomates et de piments. Chaque variété porte soit le nom de la personne qui a commencé à la diffuser, soit celui du village d’origine. Ce fonctionnement permet de retracer son chemin.

Ces semences viennent toutes de la sélection paysanne, c’est à dire issues d'un travail de sélection et de multiplication qui remonte parfois à plusieurs générations.s. Elles sont amenées par des collectifs ou organisations paysannes, actives dans la promotion de l’agriculture paysanne familiale et de l’agroécologie.

Cet échange permet de mettre en circulation des variétés paysannes. Dynamique indispensable à l'existence et à la qualité de la biodiversité cultivée, ellemet en connexion des paysan-ne-s multiplicateur-trice etleur permet de trouver de nouvelles variétés et d’échanger sur leur pratique de multiplication et de sélection. Nous avions amené quelques semences, ce qui nous a permis de prendre part à l’échange et de comprendre son importance : c’est un lieu de diffusion essentiel pour les semences paysannes, qui seront réellement utilisées dans la production.

En définitive, cet échange s’inscrit dans les pratiques des paysan-ne-s que nous avons rencontrées. Dans leur région, ils/elles produisent leurs propres semences (principalement de céréales) ou/et les échanges avec leurs voisin-e-s. Comme l’a souligné une paysanne de l’ASPSP: «la semence paysanne est une semence communautaire»; ces pratiques, complété par des échanges locaux, nationaux ou régionaux, forment les systèmes semenciers paysans autonomes basé sur la confiance. Ils sont mis en péril par les semences certifiées. Lors de cette foire, des propositions sont faitesafin de les renforcer. Par exemple, la construction de «cases de semences», qui permettent de mieux conserver les semences, de mettre à disposition les variétés paysannes de la région et de mieux les répertorier.


A côté de cet échange, plusieurs espaces ont permis de débattre et d'échanger sur les savoirs et les luttes paysannes, à travers des conférences,des ateliers et des animations culturelles. De notre coté, nous avions proposé de la documentation sur des luttes paysannes d’autres pays (Colombie, Inde, etc.) qui soulevait les questions de la pollution des eaux, des sols et de l’air par l’installation des multinationales, de la lutte contre les OGM et pour la préservation de l’environnement dans le but de maintenir une souveraineté alimentaire et une culture paysanne locale.

Le premier jour de la foire, s’est tenue une pièce de théâtre, en français, crée par la troupe de théâtre forum Kaddu Yaraax, de Dakar. Elle ouvrait le débat, avec humour, sur les réglementations touchant aux semences paysannes, et plus particulièrement sur leur vol par les multinationales. Les spectateurs et spectatrices ont pu réagir, et condamner le comportement de certains personnages. Il en est ressorti une méfiance vis à vis des scientifiques, plus particulièrement blancs et occidentaux.


La question de la place de la recherche scientifique dans les luttes paysannes pour la souveraineté alimentaire est centrale. Plusieurs fois, il a été mis en avant que les paysan-ne-s sont des «chercheur-euse-s» dans leur champ, et que leurs savoirs et pratiques sont mis en péril par la recherche scientifique et ne sont pas considérés dans le cadre institutionnel. Il en émane un autre questionnement fondamental: comment se protéger et lutter contre les grandes entreprises semencières, qui s’accaparent les semences paysannes et qui disposent d’un important arsenal judiciaire et législatif (notamment via le brevetage)?

Plusieurs modes de lutte cohabitent pour répondre à cette problématique : d'une organisation locale, permettant aux communautés paysannes de se renforcer, à une voie plus légale pour une reconnaissance des semences paysannes hors du système de propriété intellectuelle. La loi Tirpaa (Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture) a fait par exemple le sujet d’une conférence. Plusieurs paysann-ne-s déplorent d'ailleurs par le manque d’engagement et de mise en pratique de ce traité au Sénégal.


Plus concrètement, une lutte qui nous a particulièrement intéressée était celle portée par le mouvement «Nous Sommes la Solution» (NSS), lancé initialement par douze femmes leader paysannes. Nous avons pu rencontré une militante active dans ce mouvement, Mariama Sonko, qui nous a expliqué son organisation et ses objectifs. NSS est présent dans sept pays: le Ghana, le Burkina Faso, le Mali, la Guinée-Bissau, la Guinée-Conakry la Gambie et le Sénégal. Lancé en 2011 à travers une campagne pour la promotion de la paysannerie familiale, il rassemble maintenant plus de 500 associations de femmes paysannes. Elles travaillent autours de trois objectifs:

  • promouvoir le savoir et les pratiques hérités des ancêtres qui ont toujours servis à soutenir la souveraineté alimentaire
  • influencer les décideur-eu se-s pour la prise en compte de la pratique agroécologique dans la politique national agricole
  • valoriser les produits issus de l’agriculture paysanne et de l’agroécologie

Elles s’organisent au niveau local, national et international et les différents projets de luttes sont reliés grâce à des comités de pilotage composés de coordinatrices. Leur structure leur permet d’être efficace, et de faire circuler facilement les informations entre des localités éloignées.

Etant les premières concernées par l’alimentation de leur famille et communauté, les femmes sont à même d’identifier les problématiques liées à la nourriture et de proposer des solutions pour atteindre l'autonomie . De la multiplication de semences à la transformation de produits, le travail qu’elles réalisent donne des outils concrets pour atteindre la souveraineté alimentaire. Par exemple, elles ont élaboré deux types de bouillon, l’un à base de crevettes et l’autre à base de néré, une légumineuse. Elles les présentent comme une alternative et une résistance aux cubes Maggi ou Jumbo, qui se sont imposés dans la grande majorité des plats de leurs pays.

Pour finir, Nous Sommes la Solution propose également des perspectives de luttes féministes : à travers des formations et la constitution de réseaux visant à enrichir les savoirs des femmes et la possibilité de générer des revenus, une des femmes rencontrées témoigne de la position d’autorité qu’elle et ses camarades ont pu acquérir dans leur village.

Durant ces trois jours, nous avons pu créer des liens avec différent-e-s militant-e-s, avec qui nous partageons des bases communes, comme la nécessité d’utiliser des variétés paysannes pour atteindre une indépendance semencière. Grâce à ces rencontres, nous sommes rentré-e-s avec quelques graines dans les poches, une bonne bouteille de miel, du bouillon et une confiance renforcé-e-s dans nos valeurs et actions.


par Olivia et Marlène, Semences de Pays
Photos: Eline Muller



La Commission Internationale d'Uniterre (CIU)

La Commission Internationale d'Uniterre (CIU), est une commission qui fait partie de notre syndicat paysan et qui s'occupe principalement de solidarité internationale, notamment en venant en soutien à certaines organisations également membres de La Via Campesina ou en offrant un appui technique aux délégations qui visitent Genève à l'occasion du processus de la Déclaration des droits des paysan-ne-s à L'ONU. La CIU, qui est également membre de la Fédération genevoise de coopération, mène aussi un projet pour la souveraineté alimentaire au Sud. Depuis 2016, elle travaille au Sénégal avec l'ASPSP, l'association sénégalaise des producteurs de semences paysannes, une association faîtière qui regroupe une trentaine d'organisations paysannes. Le projet commun, qui se déroule dans quatre régions distinctes du territoire sénégalais, vise à développer l’intégration des semences paysannes aux démarches agroécologiques. Plus d'informations sur le projet ici. Chaque année l'ASPSP organise une foire des semences, une fois sous-régionale comme cette fois-ci, une fois nationale comme l'année passée. C'est dans ce cadre qu'une petite délégation suisse, composée de membres de Semences de Pays et d'une personne de la CIU, volontaire pour fournir un soutien technique à ASPSP ont eu la chance de participer à la foire des semences paysannes de Djimini, un grand moment de la lutte pour la souveraineté alimentaire en Afrique de l'Ouest.



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Interview de Paul Ecoffey, producteur de lait pour le fromage Gruyère et Vacherin, 50 vaches laitières, Rueyres-Treyfayes, Canton de Fribourg.


L’huile de palme est un sujet qui te préoccupe beaucoup, est-ce que tu peux m’en dire plus?

Aujourd’hui, 30’000 à 40’000 t d’huile de palme sont importées chaque année en Suisse dont 5’000 t que l’on retrouve dans les concentrés pour animaux (vaches, cochons, volailles, etc).

Je trouve cette pratique inadmissible alors que nous avons en Suisse d’autres aliments à disposition pour les concentrés, bien meilleurs d’un point de vue environnemental et nutritionnel.

Et d’autant plus, que l’une des entreprises emblématiques sur la culture d’huile de palme - qui possède aujourd’hui 189’000 ha de cultures - a une partie de son siège dans le canton de Fribourg, à côté de chez moi ! Cette entreprise, c’est la SOCFIN. C’est un groupe belgo-luxembourgeois. On se demandera d’ailleurs, au passage, ce que ce groupe étranger fait en Suisse? Une histoire d’allégement fiscal de plus.


Quand as-tu commencé à t’intéresser au sujet de l’huile de palme en Suisse?

En 2006. A l’époque, c’était concernant un autre sujet ! En effet, cette année-là, nous avons eu un surplus de beurre, qui a été écoulé via l’exportation sur le marché mondial. Mais il s’agissait d’une exportation faite à prix cassé ! Et qui en a payé le prix? Les producteur-trice-s ! En effet, la Fédération des Producteurs Suisses de Lait (FPSL) nous prélève sur chaque litre de lait quelques centimes pour financer ce que l’on appelle « le fonds de soutien de dégagement ». Au total, cela a représenté, cette année-là, plusieurs millions qui ont servi à écouler notre beurre à bas prix à l’étranger.

J’avais donc dénoncé en 2006 cela aux assemblées de l’interprofession du gruyère et de la fédération laitière fribourgeoise. Sans réaction d’ailleurs. Par la suite, j’ai parlé avec quelques connaissances en politique pour faire monter le dossier à un plus haut niveau. Le dossier est arrivé dans les mains de M. De Buman, alors conseiller national. Il a, suite à cela, déposé une motion pour les PDC demandant une surtaxe pour l’importation de l’huile de palme. Au même moment, Jean-François Rime déposait une motion semblable au nom de l’UDC.


Et quel a été la réponse à ces motions?

Le Conseil National a botté en touche disant ne pas pouvoir surtaxer l’huile de palme…. En contre-partie, il a était demandé que soit indiqué clairement sur l’étiquetage non plus seulement « huile végétale » mais bien « huile de palme ». Or, on constate aujourd’hui que cette demande n’est toujours pas appliquée et que l’on retrouve encore bien trop souvent seulement indiqué « huile végétale » ou « graisses végétales ».

Jamais je n’aurais cru que 10 ans plus tard j’en arriverais à dénoncer à nouveau ce fléau mais cette fois-ci dans l’alimentation du bétail !


J’aimerais revenir sur un point que je ne comprends pas. Comment se fait-il qu’en premier lieu ait été introduit de l’huile de palme dans l’alimentation du bétail? Avant, ce n’était pas chose courante?

Cette dérive provient de la mise en place de la prime PLVH (Production de Lait et Viande basée sur les Herbages). Il s’agit d’une prime qui veut promouvoir la consommation de fourrage grossier (90 % de fourrage de base dont 75 % d’herbes, prairies, pâturages, dérobées) en zone de plaine. Cette prime s’élève à 200 CHF par hectare de surface herbagère. Mesure intéressante en soi, mais qui a cependant engendré une dérive: pour pouvoir respecter cette mesure, il a fallu de l’autre côté limiter l’apport de concentré et donc trouver un moyen pour que ce concentré soit toujours aussi « efficace » énergétiquement. Pour cela, deux solutions: ajouter soit de l’Alikon® soit du Propylène-glycol qui est un précurseur du glucose utilisé pour prévenir l’acétonémie mais c’est un produit qui coûte cher. Et donc la solution meilleure marché: l’huile de palme ! Nous y voilà !


L’USP a justement fait un communiqué de presse le 1er juin qui dénonce cette pratique d’utilisation de l’huile de palme - je cite: « Les paysan-ne-s suisses ne veulent pas nourrir leurs animaux avec de l’huile de palme », ce qui est une bonne chose non?

Oui c’est un premier pas. Mais le problème, c’est que l’Union Suisse des Paysans (USP) s’attaque ici aux producteurs d’aliments pour animaux - en l’occurrence FENACO - qui est l’importateur principal et le plus gros distributeur d’aliment concentré en Suisse. Certes, c’est bien de dénoncer la FENACO, mais elle n’est qu’en partie responsable. C’est le système qu’il faut dénoncer, le système qui permet cela ! C’est la mise en place de cette fameuse PLVH, rappelons-le, PLVH qui a été mise en place par l’OFAG et approuvée par l’USP à l’époque !

On se demande comment l’OFAG a pu favoriser ce genre de pratique au même titre que l’exportation de notre bon beurre… La réponse n’est pas très compliquée à trouver.


Bon, il semblerait tout de même que depuis ces contestations, la FPSL a annoncé lors d’un communiqué de presse du 24 août 2017 que « La graisse de palme sera entièrement éliminée du fourrage suisse destiné aux vaches d’ici la fin de l’année (…). Elle sera principalement remplacée par de l’huile de colza ». C’est positif?

Oui, mais pourquoi donc la stopper pour le bétail mais pas pour l’alimentation humaine? Les vaches ont obtenus le droit d’éliminer cette huile, néfaste, de leur alimentation mais l’Homme, lui, s’en trouve toujours entouré. Selon cette logique, nos animaux sont nourris avec de l’alimentation plus bénéfique que la nôtre. Y aurait-il eu une coupure dans le raisonnement?


En ce moment se discute au Conseil Fédéral la possibilité d’un accord de libre-échange avec la Malaisie, accord dont l’une des conditions d’échange en retour pour la Malaisie est l’exportation possible vers la Suisse de son huile de palme.

Si cet accord de libre-échange se conclut, cela mettra en péril la production d’huile de colza suisse. Encore une fois, comment se fait-il que nos politiciens préfèrent favoriser l’importation d’une huile de palme produite dans des conditions inadmissibles d’un point de vue social et environnemental, sans respect des droits de l’Homme alors que nous avons, en Suisse, notre huile de colza qui est bien meilleure…

Enfin, avec la votation du 24 septembre 2017 sur la sécurité alimentaire, je me réjouis justement de voir appliquer les intentions de sécurité alimentaire qui devraient permettre de sauver notamment la production indigène de colza. En tout cas, c’est ce qu’a plébiscité clairement le peuple ! Et notamment, l’alinéa sur « des relations commerciales transfrontalières qui contribuent au développement durable de l’agriculture et du secteur agroalimentaire ». Est ce bien durable d’importer de l’huile de palme dont les conditions de productions ne respectent ni les Hommes, ni l’environnement?


Qu’est ce que tu proposes toi Paul?

Il faut une véritable législation. Il est urgent que l’USP se batte pour les producteur-trice-s et la production laitière suisse afin d’arrêter l’export du beurre à prix cassé parce que nous n’arrivons pas à écouler nos stocks. Et de se battre pour stopper le traité de Libre Échange avec la Malaisie, quels qu’en soient les pendants qu’elle nous fait miroiter.

Pourquoi ne pas faire une action symbolique annuelle dans la grande distribution pour remettre en avant le bon beurre suisse dans les produits industriels à la place de l’huile de palme? De plus, nous pourrions proposer une motion qui taxe l’utilisation de l’huile de palme et une autre pour la formation d’un label spécifiant « produit sans huile de palme » avec un système de différenciation par rapport aux autres labels.


Propos recueillis par Berthe Darras

article paru dans le Journal d'Uniterre de novembre 2017


Le processus de ratification par l’ONU de la Déclaration sur les Droits des paysans et des personnes travaillant dans les zones rurales a franchi une étape décisive.

En effet, la résolution concernant cette déclaration a été acceptée à une écrasante majorité ce 29 septembre par le Conseil des Droits de l’Homme.

Par ce vote (34 voix pour, 2 contre et 11 abstentions), le Groupe de travail intergouvernemental à composition non limitée a reçu le mandat de négocier, finaliser et présenter le texte du projet de la Déclaration des Nations-Unies sur les Droits des paysan-nes et autres personnes travaillant dans les zones rurales jusqu’en juin 2018.


Un soutien croissant des pays membres

Il est extrêmement réjouissant de constater la croissance du nombre de voix favorables à ce projet. En 2012, on comptait 23 voix favorables, en 2014 : 29 et en 2017 : 34 ! (voir article Uniterre du 3 juillet 2014 sur le sujet) et nous devons saluer l’engagement du groupe de travail intergouvernemental (GT) présidé par la Bolivie et l’excellente collaboration avec la société civile.

Les prochaines étapes seront consacrées aux négociations sur les contenus de la déclaration et à des actions de lobby afin que le projet de texte soit accepté tout d’abord par les pays membres du Conseil des droits de l’homme à Genève et ensuite en Assemblée générale à New York.

Un important travail attend le GT, La Via Campesina et ses partenaires pour que l’année prochaine, après plus de 10 années de travail, la déclaration soit officiellement acceptée par les Nations-Unies.


La déclaration sur les droits des paysan-ne-s et autres personnes travaillant dans les zones rurales

La déclaration veut répondre à la situation spécifique des paysannes et paysans, travailleuses et travailleurs agricoles, sans-terre, pêcheuses et pêcheurs, bergères et bergers, nomades. Pour ce faire, elle s’appuie sur des droits préexistants (déclaration des droits de l’homme, de la femme et de la citoyenne, des peuples autochtones, etc.) en les adaptant à la situation des communautés rurales et propose aussi des droits qui répondent aux menaces nouvelles dont ces communautés sont les victimes, comme entre autres, l’accaparement des terres, la déforestation industrielle et la dégradation des sols par l’érosion et l’utilisation massive d’intrants.
Concrètement, les réponses à ces menaces sont le droit à la terre, aux semences, aux moyens de production, à la souveraineté alimentaire, à la biodiversité, à un revenu et niveau de vie décent.


Une déclaration bénéfique pour toutes et tous

Cette déclaration est bénéfique pour le monde, comme le dit Olivier de Schutter que nous résumons ci-après.
« Une agriculture à petite échelle rend de nombreux services à la société, elle contribue au maintien de la biodiversité et d’un sol sain. Elle a un rôle économique et vital, non seulement parce qu’elle nous nourrit, mais aussi parce qu’elle est à la base de toute une série de métiers, commerces, unités de transformation, restaurants qui font vivre une région. Intégrée dans une économie locale, l’agriculture à petite échelle met à disposition de la population des produits frais et sains, sans transport sur de longues distances. »

De plus, la déclaration répond aux objectifs du Millénaire pour le développement et elle est une voie concrète pour le développement d’un système alimentaire plus résilient.

La Déclaration ouvre des portes, donne des outils, permet de développer des solutions pour une paysannerie et des communautés locales vivantes, autonomes et novatrices.

Michelle Zufferey


Pour en savoir plus sur les contenus de la Déclaration :


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« Nous nourrissons nos peuples et construisons le mouvement pour changer le monde » : une expérience inoubliable… Récits de Berthe et Joël, délégués d’Uniterre.


Le samedi 15 juillet, me voilà partie avec mon gros sac à dos à Derio, à coté de Bilbao, au Pays Basque ou « Euskal Herria » - en Basque justement ! – pour ma 1ère conférence internationale de la Via Campesina. Etant « jeune » et « femme », j’ai tout d’abord participé à l’assemblée des jeunes qui a eu lieu les 16 et 17 juillet et à l’assemblée des femmes qui s’est enchaînée : 17 et 18 juillet pour donner suite à 5 jours de conférence !

Bref, au total, 9 jours de conférence, autant vous dire que j’ai fini sur les rotules ☺ ! Mais ça en valait la peine… J’ai décidé de surtout vous faire partager mon ressenti, ce que mes tripes, mon cœur ont exprimé pendant cette semaine… Les déclarations, le contenu qui en est ressorti – j’y reviendrai un peu après ainsi que mon collègue Joël qui était là aussi – et vous pouvez le trouver sur le site de la Via Campesina.

Les émotions étaient au plus haut pendant toute cette semaine : je passais des larmes de joie provoquées par les sensations de lutte commune, d’inconscient collectif, où on se rend compte que partout sur cette planète, on rencontre les mêmes problèmes pour lesquels on se bat, ces moments où nous chantions tous ensemble un « Aleerta »… aux larmes de tristesse quand des collègues d’Amérique Latine nous racontaient la répression sanglante qu’ils vivent là-bas : les assassinats de paysans militants sont courants…les emprisonnements, les menaces… Ou encore cette jeune femme sud-coréenne qui a témoigné en plénière de l’assassinat de son père par un policier alors qu’il était JUSTE entrain de manifester pour ses droits dans la rue… Même certains interprètes ont eu du mal à continuer la traduction tellement l’émotion était forte…

En comptant les bénévoles, nous étions bien 600 personnes, de plus de 70 pays, lors des 5 jours de conférence. Essayez d’imaginer ! J’en ai le tournis rien qu’en y repensant. La conférence a fini en beauté avec une marche dans Bilbao le dimanche. Puis le lundi, des visites de fermes étaient organisées. C’était le moment de se dire au revoir… Mamma mia, autant vous dire qu’après cette semaine de très belles rencontres des 4 coins du monde, d’euphorie collective, les « au revoir » n’ont pas été faciles pour beaucoup…moi la première. Beaucoup m’ont dit en rentrant « ces rencontres remotivent beaucoup pour continuer la lutte », ce à quoi j’ai répondu que je n’avais pas encore eu le temps de me démotiver depuis ma prise de poste à Uniterre il y a 6 mois, mais que là, cela m’avait donné encore plus d’énergie pour avancer ! Ce que j’ai retenu de cette rencontre, c’est la belle énergie, la solidarité, l’ouverture et le respect entre tous, que l’on soit de cultures différentes, hommes, femmes, jeunes, etc : le beau côté de l’être humain…

Quelques extraits de la déclaration finale de la conférence qui m’ont particulièrement touchée : « L’agroécologie paysanne est le fondement de notre proposition et de notre vision de la souveraineté alimentaire des peuples du monde. Pour cela, nous devons nous battre pour une réforme agraire intégrale et populaire, pour la défense des territoires autochtones et paysans et pour la restauration de systèmes alimentaires locaux.

En plus de renforcer et de développer nos marché paysans locaux, nous devons construire de nouvelles relations entre les travailleur-se-s des campagnes et des villes, de nouveaux canaux de distribution et de vente ainsi qu’un nouveau modèle de relations humaines, économiques et sociales, fondées sur le respect, la solidarité et l’éthique. (…)

Il est temps de construire un monde plus fraternel, fondé sur la solidarité entre les peuples. »

Berthe Darras



http://viacampesina.org/fr



Changer le monde ! Le slogan de la 7e conférence internationale de la Via Campesina ne laisse aucune ambigüité sur le sens de notre regroupement. Nous nous unissons pour défendre nos droits paysans, nous résistons aux attaques de l’agrobusiness, en cela nous cherchons à survivre, mais au- delà de cette résistance, nous nous organisons pour une transformation qui change globalement le mode d’être ensemble de l’espèce humaine.

Pour cela, nous cherchons des alliés, nous cherchons à amener la préoccupation pour la souveraineté alimentaire à se développer dans les autres secteurs de la société, qui ne sont liés à la filière alimentaire que par son extrémité finale, les mangeurs. Et pourquoi les mangeurs ne pourraient-ils pas façonner le monde dans lequel ils vivent, vu qu’ils forment le 100 % de la population ? De plus, il n’y a pas si longtemps, eux-mêmes ou leurs parents étaient encore paysans. Un mirage leur a fait penser que la vie serait plus facile en ville, mais pour quelques bonheurs nouveaux auxquels ils ont eu réellement accès, combien de cauchemars ils doivent maintenant affronter, divisés, parce que ces bonheurs et ces cauchemars se vivent seuls ! A partir de là, pour reconstruire une action collective, il faut sortir de ces rôles de producteurs et consommateurs individuels dans lesquels nous sommes cantonnés, créer des alliances locales avec des organisations urbaines, des associations de quartier, des communautés villageoises pour construire ensemble la souveraineté alimentaire.

Ici, dans nos régions très urbanisées du nord, nous devons donc trouver des formules pour donner plus d’ampleur à ce que les anglophones appellent « agriculture soutenue par la communauté », et que nous pourrions, en faisant un pas supplémentaire vers une disparition de la division entre producteurs et consommateurs renommer « agriculture organisée par la communauté ».

Dans de nombreuses régions rurales des pays du sud, la souveraineté alimentaire est mise en pratique dans le cadre de territoires populaires, notamment en Inde et en Amérique Latine, mais là-bas aussi, sans une alliance avec les populations urbaines, ces espaces ne pourront pas opposer de vraie résistance au rouleau compresseur de l’exploitation industrielle des terres et des êtres vivants qui y habitent.

Accompagnant cette construction par en bas, nos organisations travaillent à inscrire les principes de la souveraineté alimentaire au niveau étatique: au Népal, elle a été inscrite dans la constitution, et elle pourrait l’être l’année prochaine en Suisse.

La Via Campesina se donne aussi comme mission d’aider à construire, avec son expérience, une internationale des mouvements populaires.

Parallèlement à ces alliances nécessaires à d’autres secteurs de la société avec lesquels construire ce mouvement, la Via Campesina continue son extension géographique. Des organisations paysannes partageant nos valeurs nous ont rejoint ou sont sur le point de le faire : une organisation palestinienne, une organisation marocaine et une autre de Tunisie ont été accueillies à Derio, posant les bases d’une nouvelle région Nord de l’Afrique et Moyen-Orient, s’ajoutant aux 9 régions structurant le travail de la Via Campesina. Par ailleurs, une organisation australienne a rejoint la région Asie du Sud-Est et de l’Est. Pour ce qui est de l’Europe, plusieurs organisations des pays de l’Est, fortement touchées par l’accaparement des terres, étaient présentes à la 7e conférence, et c’est une des priorités de notre région d’accompagner les mouvements paysans dans ces pays jusqu’à aujourd’hui quasi absents de la Via Campesina.

Nous nous sommes engagés à continuer, en retournant dans nos régions, à lutter localement pour la souveraineté alimentaire et contre les politiques libérales, pour un mouvement paysan libéré de ses pratiques patriarcales et soutenant ses jeunes, contre l’accaparement des terres, pour nos semences paysannes, contre l’agrobusiness et les agrotoxiques, à construire nos modèles paysans agroécologiques, seuls à mêmes d’enrayer le changement climatique, et à exprimer notre solidarité pour les peuples en lutte, en envoyant rapidement lorsque la situation l’exige des représentants de nos organisations sur le terrain.

Joël Mutzenberg, Semences de Pays